Vers une procédure antitrust de la FTC contre le rachat d'Activision Blizzard par Microsoft ?

L'acquisition d'Activision Blizzard par Microsoft pour 69 milliards de dollars doit être validée par la FTC aux Etats-Unis. Or l'autorité américaine serait peu convaincue par les arguments de Microsoft et pourrait engager des poursuites pour bloquer l'opération. 

Xbox Activision Blizzard

En début d’année, Microsoft annonçait son intention de racheter le groupe Activision Blizzard et ses licences pour plus de 69 milliards de dollars. L’opération est évidemment majeure dans l’industrie du jeu (notamment parce qu’elle pourrait chambouler les rapports de force entre les différents acteurs du secteur) et fait donc l’objet d’examens approfondis par les autorités de la concurrence de nombreux pays – le Brésil a récemment validé l’opération, mais le Royaume Uni émet des doutes et l’Europe a également ouvert une enquête en attendant de se prononcer ultérieurement.

Les enjeux de l'opération

L’une des décisions les plus attendues reste néanmoins celle de la Federal Trade Commission (FTC), l’autorité américaine de la concurrence aux Etats-Unis qui doit s’assurer qu’un groupe réunissant d’une part Microsoft (le constructeur des Xbox et déjà propriétaire du groupe Bethesda) et d’autre part Activision Blizzard (avec ses licences phares Call of Duty, Candy Crush et autres World of Warcraft) ne formerait pas un quasi-monopole de fait, constituant un abus de position dominante sur la concurrence.

Depuis maintenant plusieurs mois, Sony (sans doute le meilleur ennemi de Microsoft) se montre ainsi particulièrement véhément à l’encontre du deal, redoutant notamment (ou feignant de redouter) que les Call of Duty ne soient plus distribués sur PlayStation pour devenir une exclusivité Xbox – Microsoft a déjà annoncé avoir proposé un accord de dix ans à Sony, pendant lesquels le groupe japonais aurait la garantie de pouvoir distribuer la licence sur ses consoles.

La défense de Microsoft

Dans ce contexte tendu, la FTC diligente une enquête sur l’opération et ses conséquences depuis maintenant plusieurs mois, et dans ce cadre, l’autorité américaine a déjà menée plusieurs auditions – et notamment de Satya Nadella et de Bobby Kotick, les patrons respectivement de Microsoft et d’Activision Blizzard.

On connait les arguments de Microsoft : le marché du jeu console (58 milliards de dollars) représente à peine plus d’un quart du marché mondial de l’industrie du jeu vidéo (203 milliards) et Microsoft est le plus petit acteur du marché console (Xbox pèse pour 25% du marché console, contre 29% pour Nintendo et 46% pour Sony). Dans ces conditions, selon Microsoft, même avec l’acquisition d’Activision Blizzard, la position de Microsoft ne pourrait pas être dominante sur le marché console et encore moins du jeu vidéo. Evidemment, l’équation occulte certains paramètres comme le poids du marché mobile (Activision Blizzard détient également King Entertainment, un acteur majeur du marché mobile où Sony est peu présent) ou encore le poids de Microsoft comme éditeur, qui ne se limite pas au marché console.

Mais les doutes de la FTC

Or aujourd'hui, si l’on en croit Politico qui se fait l’écho de trois sources internes au sein de la FTC, les juristes de la Commission ne seraient pas pleinement convaincus par les arguments de Microsoft et d’Activision Blizzard. En conséquence, une action en justice visant à bloquer tout ou partie de l’opération pourrait être initiée « pas plus tard que le mois prochain » (pour interdire purement et simplement le rachat ou pour en bloquer une partie et ne permettre l'acquisition que de certaines licences ou filiales d'Activision Blizzard par exemple). Les quatre commissaires de la commission doivent encore voter pour arrêter définitivement l’opportunité d’engager ou non des poursuites, mais la question serait manifestement sérieusement sur la table – l’enquête serait donc loin d’être une simple formalité comme on pouvait l’imaginer initialement (on l’évoquait en détail dès février dernier). Pour mémoire, Microsoft est soumis à une clause de dédit à hauteur de trois milliards de dollars si l’opération n’était pas conclue.

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