GDC 2008 : les histoires de Bioware

Au début des années 90, Bioware était à l'origine du renouveau du jeu de rôle (solo) sur PC, remettant l'heroic fantasy au goût du jour avec des titres riches, plongeant le joueur dans des histoires palpitantes. Avec son MMORPG, le studio ne reprend pas les canons du genre. Au contraire, le studio reste fidèle à son savoir-faire pour les adapter aux modes du « massivement multijoueur ». Avec son MMO, Bioware entend nous raconter une histoire et parler aux sentiments du joueur.

Bioware, le célèbre développeur canadien de jeux de rôle a fait le déplacement à San Fransisco pour participer à la Game Developers Conference 2008, notamment pour y présenter la version de PC de l'un de ses derniers titres, Mass Effect.
Mais l'événement a surtout été l'occasion d'en apprendre (un peu) plus sur le MMORPG actuellement en développement dans les studios d'Austin de Bioware. A l'heure où World of Warcraft semble effrayer la plupart des éditeurs de MMO (cf. l'annulation de Marvel Universe Online par Microsoft), Bioware se montre serein et affiche une stratégie aux antipodes de celle de Blizzard.

Quelque chose de novateur

A en croire Ray Muzyka et Greg Zeschuk, les deux fondateurs de Bioware interrogés par GameSpy, même s'ils ont « des objectifs ambitieux » sur le marché du MMO, World of Warcraft n'apparaît pas comme un concurrent à craindre.
« Nous sommes notre propre concurrent, bien plus que quiconque. C'est la façon dont nous raisonnons. Il est très positif que WoW impose de tels standards de qualité. C'est sans doute le meilleur MMO qui ait été lancé à ce jour. Il y a en a d'autres qui s'avèrent bien plus novateurs, mais c'est celui qui rafle la mise actuellement, il fait grossir le marché du MMO et c'est positif pour toute l'industrie du secteur. »
Bioware se veut « ambitieux et humble à la fois » et sans craindre la concurrence, entend ne pas aller chercher les joueurs chez les autres titres massivement multijoueurs, mais proposer du contenu « qu'on ne trouve pas ailleurs ».
Dans le cadre du DICE Summit 2008, au début du mois, Blizzard faisait reposer sa « stratégie du succès » sur une philosophie exactement inverse, s'imposant un strict calcul des risques et s'interdisant des innovations trop flagrantes. Au contraire, Bioware mise sur la nouveauté, et compte « faire grossir encore le marché du MMO ».

Et pour fonder son analyse, le duo affirme examiner ce marché et faire mûrir son projet de MMO « depuis 15 ans », attendant patiemment de « former la bonne équipe, composée de personnes qui respectent la bonne philosophie, à destination de la bonne communauté et avec les bons partenaires ».
Maintenant que tout est bien dans le meilleur des mondes, en quoi le MMO de Bioware se distingue de ses homologues ?

Raconte moi une histoire

Selon Ray Muzyka, le maître mot chez Bioware consiste à imaginer les meilleures histoires pour leurs jeux et de susciter une profonde émotion chez le joueur. « Dans tous nos jeux, vous pourrez constater que notre objectif est de faire naître un sentiment chez le joueur, qu'il peut partager avec ses coéquipiers, en donnant du sens à la découverte d'un nouveau monde, en suscitant un sentiment de fierté quand il progresse ou une peur viscérale quand il combat ».
Si le « souffle épique » est l'un des principaux objectifs de tous les développeurs de MMORPG, « raconter une histoire » s'avère sensiblement plus compliqué. Et pour cause : on imagine mal des milliers de joueurs vivre en même temps et parallèlement la même histoire avec ses rebondissements et son dénouement dans un MMO qui, en principe, ne repose pas sur un scénario linéaire.

Bioware prend le contre-pied des théories classiques qui gouvernent le game design de MMORPG. Si Greg Zeschuck refuse de trop en dire à l'heure actuelle, l'objectif de Bioware reste de faire en sorte que les joueurs « prennent du plaisir, vivent une expérience sociale et apprécient une histoire ensemble ».
« Une autre chose dont les gens doivent se souvenir est qu'un MMORPG est une longue expérience... elle se compose littéralement de centaines et centaines d'heures. » Encore un élément à exploiter. Dans ce contexte, les concepteurs de MMO doivent « encourager les joueurs à essayer sans cesse de nouvelles choses ».
Sans pour autant se détourner des « piliers traditionnels du MMORPG » (l'exploration, le combat et la progression), Muzyka et Zeschuck estiment que depuis nombre d'années, les développeurs de MMORPG ont délaissé un quatrième « pilier » fondamental du MMO : une histoire et une trame narrative. « Si vous combinez les trois piliers traditionnels avec le quatrième, vous pouvez obtenir quelque chose de magique ».

Selon le duo, il s'agit d'entraîner le joueur dans la narration : « la progression, la personnalisation, l'exploration et le combat sont autant de conducteurs pour encourager le joueur à progresser au sein du jeu. Autant de formes narratives différentes »... tout autant que d'appréhender la façon dont le style de combat du joueur peut changer au fil de l'histoire, comment ses capacités évoluent ou qu'une carte se modifie progressivement. « La question intéressante est de savoir comment transposer tout ceci ».

Je ne suis pas un héros

Une autre question intéressante serait de savoir comment faire naître ce sentiment dans un MMORPG dans lequel chaque joueur est « le héros », dans lequel chaque joueur est potentiellement le principal protagoniste de l'histoire. Enigmatique, Greg Zeschuck et Ray Muzyka affirment que c'est « le coeur de leur approche du game design ». « Comment faire en sorte que le joueur se ressente comme un héros... ou comme le méchant de l'histoire ? »
Le duo se garde bien de livrer ses secrets mais affirme avoir la réponse.

Les joueurs jouent « pour vivre une expérience fantastique, pour s'évader, pour vivre quelque chose qui n'existe pas dans la vie réelle. C'est le défi à relever ». Et de conclure : « notre approche semble plutôt bonne ».

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