Forum des droits sur l'Internet : Entre libertés fondamentales et protection des personnes fragiles

Par définition, les jeux massivement multijoueurs mettent des centaines, voire des milliers de joueurs en relations. Ils discutent, échangent, interagissent. Pour autant, selon Laurent Baup, chargé de missions pour le FDI durant la conférence de presse de présentation de la recommandation, « on ne peut pas tout dire dans un MMO, même sous couvert de Roleplay et la recommandation "Jeu en ligne" s'est attachée à définir un encadrement, des limites à la liberté d'expression ». Dans un MMO comme sur Internet, la loi s'applique et prévaut. La diffamation, l'injure ou l'incitation à la haine raciale n'ont pas leur place.
D'autant que, selon Laurent Baup, les « éditeurs se sont montrés généralement plutôt responsables ». Dans Second Life, par exemple, des « résidents » du metaverse de Linden Lab (adultes) incarnaient des avatars représentant des enfants afin d'organiser des jeux virtuels pédopornographiques. En France, une telle pratique est illégale. La simple représentation, même non réaliste d'actes pédopornographiques est passible de poursuites. A l'inverse des Etats-Unis où la liberté d'expression prime. Pour autant, le créateur Linden Lab a interdit ces pratiques dans son univers virtuels, préférant s'aligner sur les législations les plus protectrices. Le Roleplay cède devant la loi et les éditeurs tendent à la faire respecter.

Ainsi, si les joueurs doivent apprendre et savoir se modérer, il appartient tout autant aux éditeurs de modérer les univers dont ils ont la charge et d'assurer un encadrement fiable des modérateurs (parfois bénévoles). Le coût de la modération étant particulièrement élevé, la recommandation du FDI appuie par ailleurs l'attribution d'aides publiques aux éditeurs soucieux du contenu de leurs univers (sous forme d'aides directes ou de crédits d'impôts, déjà envisagés par le gouvernement ne souhaitant pas voir l'industrie française du jeu se délocaliser, notamment au Canada).
Le Forum recommande également la généralisation des « boutons d'alerte » disponible au sein du jeu, permettant de signaler dans le MMO, les comportements inapproprié (sans se contenter d'une possibilité de signalement hors du jeu).

Pratiques excessives

Au cours de son étude, le groupe de travail a auditionné plusieurs psychologues, notamment pour aborder le cas des problématiques dites d'addiction dans une rubrique « Gérer son temps de jeu ». Il résulte des auditions que le terme « addiction » n'est pas adapté. Si elles existent, les pathologies sont rares et stigmatiser le joueur n'apparaît pas souhaitable. C'est la raison pour laquelle la recommandation traite des « pratiques excessives », renvoyant directement au « temps de jeu » du joueur. Pour autant, le FDI n'a pas souhaité définir une durée précise au-delà de laquelle un joueur serait considéré comme ayant une pratique excessive. Selon Laurent Baup, il convient de relativiser : un père de famille, travaillant à plein temps, jouant 10 heures par semaine risque de voir son temps de jeu empiéter sur d'autres activités. A l'inverse de l'étudiant, par exemple, qui disposera sans doute de plus de temps libre et pourra s'adonner à la même durée de jeu sans grande conséquence. Au-delà d'une durée précise, la perte du lien social apparaît comme un critère déterminant permettant d'évaluer si une pratique devient ou non excessive.
C'est la raison pour laquelle le FDI recommande par exemple l'affichage d'une horloge dans le jeu, mentionnant en permanence l'heure, mais surtout la durée des sessions de jeu. A chacun d'adapter son temps de jeu en fonction de ses disponibilités.

Le joueur, producteur de contenu

De part leur caractère massivement multijoueur, les MMOG invitent les joueurs à produire du contenu, que ce soit simplement dans le cadre de discussions ou en enrichissant l'univers de jeu. Cette intervention des joueurs leur ouvre des droits surl e contenu du jeu et influence la classification des MMO (un jeu classé « 12 ans et plus » lors de sa sortie pourra accueillir des discussions, « mods », voire des objets créés par les joueurs et réservés à un public mature).

PEGI et PEGI Online

En matière de classification, le groupe de travail du FDI loue les atouts de la classification PEGI et plus récemment de PEGI Online depuis juin 2007 pour le jeu en ligne. Elle est unanimement utilisée par les éditeurs de jeu et répandue sur l'ensemble du territoire européen. Pour autant, selon Laurent Baup, si le système PEGI est un premier pas incontestable, il connaît aussi des lacunes.
Le système PEGI est d'abord relativement méconnu du grand public. Les pictogrammes ne sont pas toujours reconnus ou confondu avec la difficulté du jeu. Un jeu de sport par exemple, sera généralement classé « trois ans et plus » dans la mesure où son contenu n'est ni violent, ni injurieux, etc. Pour autant, un tel jeu n'est pas forcément accessible à joueur de trois ans.
Selon Laurent Baup, les classifications PEGI et PEGI Online doivent faire l'objet d'une communication accrue et très précise. Le groupe recommande donc une généralisation de l'usage des sigles PEGI sur les jeux eux-mêmes mais aussi dans la presse vidéo ludique, les sites d'information traitant de jeux vidéo ou encore dans la publicité. C'est la raison pour laquelle les sigles PEGI apparaissent maintenant de façon plus visible sur le portail JeuxOnLine.

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