Stratégies de Blizzard et SOE : prospective

Et il en va de même pour le « jeu mystérieux de SOE » dévoilé lors de la Fan Faire 2007. Pour la manifestation, John Smedley avait décidé « de remercier les joueurs présents » en leur révélant en avant première, l'un des prochains projets de la marque. Il a levé le voile sur... Legends of Norrath, un jeu de cartes à collectionner jouable à la fois depuis EverQuest et EverQuest 2. Ces deux jeux, qui ont longtemps symbolisé le « hard core gaming », avec leurs raids nécessitant parfois la réunion de plusieurs dizaines de joueurs et dont le contenu haut niveau n'est accessible qu'après plusieurs centaines d'heures de jeu, auraient un avenir reposant notamment sur la collection de cartes (que l'on ne peut même pas s'échanger entre joueurs). Un archétype traditionnel du jeu occasionnel.
Et le choix de cette annonce lors de la Fan Faire n'est sans doute pas un anodin puisque la semaine suivant cette manifestation, SOE annonçait Ramayan 3392 A.D., un nouveau MMO sans doute plus classique mais dont pas un mot ne fut soufflé lors de la convention de Sony.

Blizzard, SOE : des stratégies antinomiques

Là où Blizzard exploite son unique MMORPG payant (avec un incontestable succès populaire) se contenant de l'adapter à la concurrence au gré de ses extensions annuelles pour en faire un titre quasi universel, Sony Online Entertainment multiplie les jeux en ligne gratuits à destination de publics très variés et parfaitement ciblés (un public plutôt féminin ou masculin, d'ages divers, s'adressant au marché émergeant indien ou à l'occident, aux joueurs de PC ou de consoles, etc.).

On peut s'interroger sur la pertinence de l'une ou l'autre des stratégies. Celle de Blizzard avec World of Warcraft et ses neuf millions de joueurs a évidemment fait ses preuves, au point que Mike Morhaime, président de Blizzard, ait été convié à l'Austin GDC début septembre 2007 pour décrypter la façon dont sa société a réussi à exploiter et renouveler une licence unique. Malgré le succès commercial de World of Warcraft, la stratégie de Blizzard fait montre d'un classicisme à toute épreuve (la société est plus connu pour la qualité et l'accessibilité de ses titres que pour son innovation, que ce soit en terme de gameplay ou de modèle économique).
A l'inverse, Sony, malgré son statut de géant du jeu en ligne semble renouer avec les fondamentaux qui ont fait son succès à la fin des années 90. En 1999, EverQuest marquait les esprits et s'imposait comme une incontestable réussite commerciale grâce à l'innovation du produit (avec jusqu'à 650 000 abonnés, là où attirer 200 000 joueurs étaient l'objectif de tous les éditeurs de MMO). SOE avait fait le pari du jeu en ligne alors qu'Ultima Online avait à peine ouvert la voix du MMO auprès du grand public et proposait pour la première fois, un univers intégralement en 3D à une époque où le matériel informatique permettant de l'afficher n'était pas encore démocratisé. Quelques années plus tard, SOE tente le nouveau pari du « F2P » en étant le premier en occident à concevoir et exploiter des jeux gratuits (ses homologues se contentant d'adapter des produits asiatiques au marché occidental), du jeu occasionnel et d'un gameplay moins traditionnel.

Si l'on se gardera bien de faire le moindre pronostique de succès, tant commercial que critique, la démarche a au moins le mérite de faire « bouger les lignes » du marché du MMORPG (pourtant l'archétype traditionnel du jeu vidéo complexe, peu accessible, voire élitiste). Les éditeurs de MMO devront quoiqu'il en soit s'adapter à une concurrence bien plus accessible (financièrement mais aussi en terme de gameplay). Tout comme les joueurs dont les comportements de jeu seront susceptibles d'évoluer ayant la possibilité de tout tester sans contrainte et qu'il conviendra de séduire rapidement. Rendez-vous dans quelques années pour déterminer qui des « vieux pots » de Blizzard ou des cuisines « New Age » de SOE font les meilleures soupes.

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