Le « Nom Réel » à l’épreuve de la loi Informatique et Libertés

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Sans aller si loin, la question juridique se pose néanmoins et est déjà soulevée par les joueurs de World of Warcraft qui ont pris d'assaut la permanence téléphonique de la CNIL (l'autorité en charge de la protection des données personnelles des Français aurait reçu plusieurs dizaines d'appels en 48 heures, suite à l'annonce de Blizzard).

En France, pays traditionnellement à l'avant-garde de la protection de la vie privée, la loi du 6 janvier 1978 (la loi « Informatique et Libertés ») pose notamment les bases du droit d'opposition dans son article 38. Par principe, chacun peut s'opposer à l'indexation de ses données personnelles dans un fichier et décider de l'usage qui pourra ou non en être fait. L'intéressé doit en outre être informé des conséquences de son choix (de ce dont il se prive en s'opposant à l'utilisation de ses données).
Et force est de constater qu'en l'espèce, Blizzard applique scrupuleusement cette ligne de conduite. A en croire les déclaration des équipes d'animation de Blizzard, le joueur devrait être informé que son identité deviendra publique s'il participe sur les forums officiels. S'il s'y oppose, il renonce dans le même temps à utiliser les forums officiels et fait son choix en conscience.

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Annulation de précommande

On sera néanmoins plus circonspect quant au droit de rectification posé par l'article 40 de la loi Informatique et Libertés. Au-delà de l'éventuel traitement ou publication des données personnelles, la loi de 1978 confère à chacun le droit d'exiger que soient « rectifiées, complétées, mises à jour, verrouillées ou effacées les données à caractère personnel [le] concernant ». Et manifestement, l'exercice du droit de rectification est laborieux dans Battle.Net puisque le joueur ne peut pas modifier lui-même son identité (quand bien même on suppose que Blizzard exécuterait une modification des noms et prénoms des joueurs contactant formellement le studio).
Le processus soulève néanmoins des questions dans la mesure où Battle.Net est maintenant une composante indispensable des jeux Blizzard et que la suppression des « données personnelles provoquera la suppression de votre compte et des services applicables ». En d'autres termes, refuser de confier ses données personnelles au développeur équivaut à ne pas pouvoir jouer. Non seulement le choix est drastique (d'autant plus pour les anciens joueurs mis devant le fait accompli) mais force est aussi de constater que cet enjeu reste peu visible, voire pas du tout, lors de l'achat d'un jeu Blizzard, par exemple (nombre de joueurs ayant précommandé StarCraft II sans information quant au traitement de leurs données personnelles au moment de l'achat affirment par exemple aujourd'hui annuler leur engagement suite à l'annonce de Blizzard).

A ce jour, il reste difficile d'évaluer les conséquences effectives du « Nom Réel » : malgré la fronde, Blizzard affirme avoir des projets à long terme pour son réseau de « social gaming » et ne compte manifestement pas faire marche arrière, mais on connaît aussi l'importance que le développeur accorde à son image et force est de constater que rares sont ceux à défendre aujourd'hui l'initiative du studio. Pour autant, au regard de l'emballement de ces derniers jours, le « Nom Réel » aura sans doute démontrer que les communautés n'ont pas besoin de « réseaux sociaux » pour se mobiliser, se coordonner et se faire entendre parfois bien au-delà des sphères qui leur sont traditionnellement dévolues.

Le Nom Réel, un revirement radical

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