Test de RAGE 2 - Couleurs vives et gros flingues, la folie s'est perdue

Suite inattendue, RAGE 2 est l'objet d'une collaboration entre id Software (Rage, Doom) et Avalanche Studios (Mad Max, Just Cause). Le fruit de l'expertise du jeu de tir à la première personne des uns et de celle du monde ouvert pour les autres promet dès ses premiers instants du fun à base de gros flingues et de cheveux colorés, avec un arrière-goût certain d'un certain Mad Max. Que le pari soit réussi ou non, on ne peut lui retirer la curiosité qu'il suscite.

En 2165, trente ans après les événements du premier opus, l'humanité a enfin trouvé le moyen de sauver la planète et de rendre le Wasteland beaucoup plus habitable avec une nature qui fait son retour au milieu des plaines autrefois arides. Cependant, cela n'enlève rien à la violence de son monde, de ses bandes armées et de l'Autorité, qui fait son retour sous l'égide du Général Cross pour s'emparer du monde. On incarne Walker, un personnage (féminin ou masculin, au choix) qui porte le dernier espoir de l'humanité.

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Rendez-vous en terre connue

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Bien que l'action se déroule trente ans après le premier, RAGE 2 nous rappelle rapidement aux bonnes habitudes du premier épisode avec des personnages secondaires tout droit sortis du jeu de 2011. Il évoque régulièrement Nicholas Raine, le héros du premier épisode, devenu un véritable héros du Wasteland, mais qui a péri depuis bien longtemps. On retrouve surtout trois PNJ, Antonin Kvasir, Loosum Hagar et John Marshall, qui sont désormais des vétérans de la résistance, et nous confient quelques missions afin de préparer un assaut final contre le terrible Général Cross. Une excuse pour nous faire taper des hordes de mutants et de soldats de l'Autorité, au moyen de flingues aussi gros que puissants. Les têtes explosent, les corps sont projetés à des dizaines de mètres, les coups de poings sont dévastateurs : pas de doute, on est dans un jeu id Software avec le feeling qu'il impose. Finalement assez proche du DOOM de 2016, bien qu'on y colle cette fois différents pouvoirs tels que le dash, la suspension en vol, un bouclier ou encore l'Overdrive, qui multiplie temporairement la force et la vitesse du personnage et des armes, le jeu ne déçoit pas sur son gunplay avec des affrontements rythmés à grands coups de fusil à pompe dévastateurs et de tirs en pleine tête bien sentis. La lourdeur initial du personnage se compense assez rapidement grâce à son système d'évolution et on a vite le sentiment d'être en terrain connu avec un jeu qui ne trompe pas nos habitudes.

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Le jeu propose un système d'évolution à base de "nanotrites", des ressources que l'on récupère sur les cadavres encore chauds des ennemis, ainsi que quelques caisses de ressources ici et là. Ils servent essentiellement à faire évoluer les pouvoirs de notre personnage, comme celui de revivre une fois mis à terre, de courir plus vite ou d'encaisser plus de balles, tandis que la collaboration avec les trois PNJ cités précédemment ouvre droit à des bonus que l'on peut débloquer au moyen d'une ressource acquise en effectuant des missions pour eux. C'est là que RAGE 2 nous perd, dans un monde ouvert aussi vide que chiant. Soyons très honnêtes, le jeu de id Software et Avalanche Studios échoue à capter notre attention dans son monde qui rappelle furieusement celui du jeu Mad Max sorti en 2015, tant pour ses plaines désertiques que ses jeux de lumière au petit matin. Cependant, la comparaison ne s'arrête pas là puisque les activités proposées par ces trois PNJ y ressemblent également : destruction de gangs, destruction d'avant-postes et parfois on croise ici et là un convoi tout droit sorti de Mad Max à attaquer au moyen de notre véhicule surchargé. Les plus courageux participeront aux courses, les autres se concentreront plutôt sur la seule mission secondaire à l'intérêt certain, la recherche des "arches", qui donnent accès à de nouveaux pouvoirs et à de nouvelles armes. Pour autant, ne vous attendez pas à des missions particulièrement passionnantes, puisque l'essentiel du boulot consiste à taper inlassablement tout ce qui bouge face à une intelligence artificielle très limitée qui pousse la plupart des ennemis à vous foncer droit dessus, quitte à prendre gros coup de fusil à pompe. C'est évidemment la force du jeu, le style de id Software est reconnaissable et particulièrement jouissif, notamment dans les missions en lieu clos où on s'amuse facilement à défourailler les ennemis qui ont le malheur de se mettre en travers de notre chemin.

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Ce monde ouvert occupe pourtant une place prépondérante dans ce RAGE 2. Plus important que dans le premier épisode, il ne constitue néanmoins qu'une interface entre chaque missions où l'on suit bêtement le GPS (représenté par de grandes flèches néon-violettes au sol, appréciez le goût). Rien dans ce monde ouvert imaginé par Avalanche Studios n'incite véritablement à l'exploration : elle n'est jamais vraiment récompensée, avec seulement quelques caisses de ressources ici et là et visuellement tout a tendance à se ressembler ou à paraître inaccessible avec des gouffres, des arbres et des bâtiments délabrés qui nous rappellent qu'il vaut mieux suivre la route. Entre la répétitivité des missions secondaires et son monde cruellement vide, RAGE 2 ne nous donne qu'une envie : enchaîner les quêtes principales pour en venir à bout.

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En effet, le problème est bien là : RAGE 2 semble incapable de capter l'attention du joueur dans un monde qui semble terriblement mort. Pourtant, la vie est revenue sur le Wasteland, mais elle s'éteint aussi vite au milieu d'un ennui général. Ce n'est pas la narration qui rattrape le coup, puisque tout est facile et caricatural, à tel point que le personnage principal tente de sauver les meubles en ironisant sur le caractère répétitif de ses actions. Les personnages secondaires sont alimentés par une pseudo-folie dont le comportement semble crier sans arrêt "regardez, nous on est des fous !", comme le suggèrent sans cesse les cheveux fluos et les néons violets un peu partout pour donner un semblant de vie à l'ensemble. Certes, quelques dialogues parviennent à nous faire décrocher un sourire, via une référence bien sentie de temps en temps ou un nom de PNJ qui fait rire. Néanmoins, au final, le jeu ne ressemble qu'à un rejeton un peu boiteux de Doom et de Mad Max, en reprenant le côté jouissif des combats du premier et quelques jolis panoramas du second. Il tourne d'ailleurs sur le moteur APEX Engine de Avalanche Studios, mais ne se révèle pas non plus très convaincant sur consoles comme on le verra plus tard dans ce test.

Le vide comme ambiance

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Si les développeurs avaient l'intention d'instaurer une sorte de solitude, c'est plutôt réussi : les rencontres sont rares, les quelques villes sont figées, les campements se ressemblent tous et les quelques collectibles à récupérer ici et là ne nous apprennent rien de très intéressant sur son univers. Si on esquisse un sourire lorsqu'une prime nous demande d'aller assassiner un délinquant coupable d'avoir porté des chaussettes avec ses claquettes, la folie promise par le jeu semble toujours forcée et à la limite de l'indigeste. Les combats ont tendance à tourner en rond et l'IA hasardeuse rend les pouvoirs assez peu utiles, tandis que le jeu va jusqu'à recycler un même boss quatre fois dans quatre combats exactement identiques. Cela représente d'ailleurs la majorité des combats de boss puisqu'il y en a très peu et ils s'enchaînent vers la fin du jeu dans des séquences qui se ressemblent toutes à base de forteresses secrètes au level design et aux décors absolument identiques.

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Le sentiment de déjà vu est prégnant tout au long du jeu ; ce manque de renouvellement fait que malgré une campagne très courte, quinze heures grand maximum en prenant son temps avec quelques missions secondaires ici et là, la lassitude arrive très vite pour un jeu qui montre tout ce qu'il a à offrir dans ses premiers instants. Si le contenu secondaire est très généreux, il se répète en boucle. Pourtant, il offre paradoxalement une certaine diversité du côté des armes, que l'on peut améliorer, ainsi que des véhicules, qu'il faut trouver sur la map et ramener dans une ville pour les sauvegarder, qu'il s'agisse de véhicules terrestres ou de mi-drone mi-moto. C'est la même chose du côté des armes : si on reste dans quelque chose de très classique, le jeu offre de quoi s'amuser, tout en reprenant le concept du "wingstick" du premier opus, une sorte de boomerang qu'on jette à la gueule des mutants avec une satisfaction non-dissimulée. On regrette toutefois que le "BFG" de Doom ne soit accessible qu'avec la version Deluxe du jeu (entre 80 et 90 euros, quand même) et peut-être un jour dans un DLC.

Enfin, disons un mot sur l'aspect technique. Testé dans sa version Xbox One, RAGE 2 déçoit terriblement. Malgré quelques jolis paysages, les textures sont baveuses et le clipping très présent, tandis que le jeu peine à maintenir les 30 images par seconde dans certaines zones, comme celle du marais. Au-delà de ça, il était fréquent de voir l'affichage tête haute (ATH) disparaître lors du retour d'une pause ou des ennemis qui ont tendance à rester bloqués par un élément de décor que le pathfinding ne semble pas comprendre.

Conclusion

L'expertise de id Software en matière de gunplay se heurte à celle de Avalanche Studios en mondes aussi ouverts que génériques. De son cheminement bateau à ses missions répétitives, Rage 2 est un énième exemple d'un mal qui ronge le genre du monde ouvert. Avec une carte peu engageante, malgré quelques très beaux panoramas grâce à plusieurs zones à l'identité certaine et des missions qui ne tirent pas profit de l'espace offert, le jeu s'embourbe dans un genre fourre-tout en y associant une direction artistique qui peine à exprimer la folie ambiante. On lui reconnaît toutefois un gunplay parfaitement jouissif, du feeling des armes aux corps qui s'éjectent à coups de fusil à pompe, et c'est probablement ce qui lui donne quand même un certain charme.

Test réalisé par Hachim0n à partir d'une version Xbox One fournie par l'éditeur.

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