Test de Total War Warhammer 2 : comment dit-on "mieux que parfait" ?

Il y a un an et demi, nous testions Total War : Warhammer, rêve né depuis l'annonce du partenariat entre Sega et Games Workshop. Le partenariat ne se limitant pas à un seul jeu, une suite a déjà vu le jour, Total War : Warhammer 2. Le timing a pu en déranger certain, mais le test présente surtout une importante difficulté : comment montrer que le jeu est mieux que le précédent, que nous trouvions déjà parfait ?

Différence, y es-tu ?

C'est le point de départ de chacune de nos analyses des contenus supplémentaires de la franchise. En effet, la grande force de Total WAR : Warhammer est de proposer, pour la première fois dans la franchise Total War, des factions réellement différentes, apportant une expérience de jeu unique pour chaque partie. Les Skavens, Hauts-Elfes, Hommes-Lézards et Elfes noirs sont-ils aussi uniques que les races du jeu de base et que les Hommes bêtes, les Elfes Sylvains et les Norses ? Non, absolument pas. En effet, la comparaison est très cruelle, car les races de Total War : Warhammer 2 ne sont pas aussi uniques que celles du premier Total War : Warhammer... elles le sont bien plus.

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Prenons les Skavens en exemple, parce que c'est la race la plus cool de cet univers, comme chacun le sait. Les Skavens ont un fonctionnement bien particulier en bataille, qui ravira les amateurs du jeu de figurines. Ils disposent en effet d'une infanterie de pacotille, de tireurs pathétiques et d'aucune cavalerie, le tout avec un moral ridicule, mais compensent par une artillerie dévastatrice, des sorts puissants et la possibilité de surprendre en tout temps leurs adversaires. Pour y parvenir, ils disposent bien évidemment d'unités furtives, mais aussi d'une compétence bien pratique : faire surgir du sol une unité de guerriers des clans, parfaite pour prendre un ennemi à revers ou démanteler l'artillerie adverse. Cette compétence est toujours présente, mais peut être augmentée en investissant un peu de nourriture avant la bataille. Ah, la nourriture. Nous y venons.

La nourriture constitue la base du fonctionnement des Skavens. Cette valeur est affichée en haut de la carte de campagne et octroie des bonus ou des malus en fonction du pourcentage des stocks de nourriture remplis. À la manière des Elfes Sylvains avec l'ambre, absolument tout coûte de la nourriture : les colonies, les armées et certaines actions sur lesquelles nous reviendrons plus tard. Pour compenser cela, il est possible de construire des bâtiments spécifiques, de donner des ordres aux provinces occupées ou... de combattre, chaque affrontement offrant son lot de nourriture.

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Une carence en nourriture faisant baisser le commandement, l'ordre public et la croissance dans des proportions importantes, il est vital de conserver cette valeur au plus haut. Cependant, il est aussi particulièrement tentant de la dépenser... puisque sacrifier de la nourriture permet d'augmenter le nombre d'utilisations de la capacité évoquée plus tôt, mais aussi de prendre directement possession de villes avancées. Une colonie est par défaut au niveau 1, mais dépenser 20 de nourriture permet de la monter d'un niveau, investir 40 de l'élever de deux niveaux et ainsi de suite jusqu'à son niveau maximal. Il est donc possible d'avoir directement une capitale provinciale à son niveau suprême... mais le prix à payer est alors très lourd.

Les anciennes factions avaient toutes des mécaniques propres sur la carte de campagne, comme par exemple les chasses aux monstres pour les Norses ou la résurrection pour les Comtes-vampires. Cependant, il s'agissait généralement de détails à l'importance modérée, alors que pour les Skavens, la nourriture joue un rôle capital. Je précise que j'ai pris en exemple cette seule faction et que je ne ferai pas la même démonstration pour chacune des trois autres, mais toutes quatre se démarquent véritablement, tant en bataille que sur la carte de campagne. Total War : Warhammer apportait les factions les plus diversifiées de l'histoire de saga ; Total War : Warhammer 2 apporte à son tour les factions les plus diversifiées de l'histoire de la licence, rendant dépassé son aîné d'un an à peine. Le tout avec un respect de la licence et une attention aux détails qui montrent mieux que mille mots pourquoi Warhammer : The End Times - Vermintinde est une hérésie.

Précisons que les anciennes factions ne sont pas en reste. Si elles ne sont pas jouables sur la carte principale de ce nouvel opus (officiellement du moins), toutes les races du premier opus et de ses DLC sont présentes, apportant une diversité bienvenue à l'expérience de jeu.

Conquer Anywhere & Legendary Lord Unique Start Position

Entre deux éloges immodérés, nous avions soulevé deux défauts importants de Total War : Warhammer. Premièrement, chaque race n'avait accès qu'à certains territoires, obligeant à raser les autres, ce qui transformait les campagnes en des affrontements assez binaires. Deuxièmement, la coopération, point important des précédents Total War, était beaucoup moins convaincante. En effet, chaque faction ayant ses propres adversaires, la coopération se résumait souvent à deux parties distinctes, avec une collaboration réelle beaucoup trop mince. Nous ne nous étions en revanche pas attardés sur ces défauts, car des mods disponibles dès la sortie du jeu les corrigeait.

Cependant, aucun mod ne peut parfaitement corriger un problème. Conquer Anywhere faisait disparaître le problème, mais supprimait l'intérêt des Elfes Sylvains et des Norses, apparus plus tard. De même, Legendary Lord Unique Start Position permettait à deux joueurs d'utiliser la même faction... mais l'un d'eux devait accepter de renoncer aux évènements et aux succès.

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Creative Assembly a semble-t-il pris conscience de ces erreurs et les a corrigées dans ce deuxième opus. Habitude prise depuis le DLC débloquant les Elfes Sylvains, chaque race de Total War : Warhammer 2 dispose de deux sous-factions, offrant des parties multi-joueurs conformes à ce que nous proposait les anciens Total War.

De même, la modification de la conquête semble particulièrement pertinente. Désormais, les territoires sont divisés en trois catégories : ceux dont le climat est adapté à la race jouée, ceux dont le climat n'est qu'acceptable et ceux dont le climat est inadapté. Il est possible de coloniser chacune de ces colonies, mais prendre possession d'une colonie non adaptée engendre d'importants malus : baisse d'ordre public et de croissance, augmentation de la durée de recrutement et de construction, coûts augmentés... Le joueur demeure entièrement libre, mais certains territoires sont plus intéressants pour lui que d'autres.

A Telltale Game Serie

Cependant, ce ne sont pas les seuls petits ajouts sympathiques que nous réserve Creative Assembly pour cet opus. Chaque race du nouveau monde possède des rites, apportant des bonus petits, mais appréciables : amélioration de la croissance, usure pour les ennemis présents sur le territoire, destruction des murs d'une colonie adverse, etc. De plus, les mers, grand ajout de cet opus, ne sont pas vides : elles regorgent de trésors. Ces trésors sont parfois de banales récompenses pécuniaires ou un simple gain d'expérience, mais ils offrent dans quelques cas un choix : améliorer ses forces en campagne (mobilité, reconstitution, etc.) ou en bataille (résistance, dégâts, etc). S'approprier ces récompenses peut changer le cour d'une partie.

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Les choix semblent être une priorité pour Creative Assembly dans cet opus, puisque la liberté offerte au joueur ne s'arrête pas là. Lors de la colonisation de villes en ruine, une nouvelle option s'est ajoutée : chasse aux trésors. Bien que minimaliste (un seul choix), cette option rappelant les livres dont vous êtes le héros apportent un peu de fraîcheur bienvenue et des récompenses toujours sympathiques, avec pour prix de devoir attendre un tour pour prendre possession du territoire.

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The Inpatient

Nous n'avons cependant pas évoqué l'ajout majeur de ce nouvel opus, cité de manière importante par Creative Assembly : la campagne du Vortex. Chaque faction doit récupérer des ressources spécifiques et effectuer cinq rituels ; la première à les finir tous remporte la campagne. Au terme de chaque rituel accompli par le joueur, une cinématique est proposée, différente pour chaque race et assez bien écrite, bien que ces vidéos soient loin d'égaler celles d'Halo Wars 2, codéveloppé par le même studio et sorti plus tôt cette année. Ces cinématiques sont agréables et la mécanique force le joueur à être attentif à l'avancée de ses voisins : s'il se montre trop prudent et avance lentement, mais sûrement, il a de fortes chances de perdre la partie.

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De même, le Vortex réussit son pari d'apporter de la difficulté en fin de partie. En effet, chaque rituel fait apparaître de nombreuses armées ennemies dans le territoire de celui l'ayant accompli, contraignant à une défense délicate. Même en fin de partie, voir six ou sept armées apparaître soudain au coeur de ses frontières provoque un stress inhabituel à ce stade du jeu dans les précédents Total War. Pour triompher, il sera indispensable de se montrer stratège et de ne pas hésiter à sacrifier ce qui ne peut être défendu. Alors, le Vortex est-il pleinement convaincant ? Au contraire : il est plutôt le gros point noir de ce deuxième opus.

Oui, le rituel force à se dépêcher pour éviter qu'un adversaire ne triomphe. Dans le cadre de ma première partie, les Elfes noirs de Naggarond étaient tout proches de l'emporter alors que mes Skavens du clan Mors en étaient très loin. Pour les empêcher de faire le dernier rituel, une seule solution : envoyer toutes mes armées à l'autre bout de la carte et réduire au néant ce qui était auparavant la première puissance du nouveau monde.

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Le scénario est palpitant et montre assez bien les avantages de cette nouvelle campagne. À ce moment, mes territoires étaient vulnérables et j'aurais facilement pu tout perdre. Cependant, ce n'est pas arrivé et je suis parvenu à mes fins. Les territoires Naggarond devenus miens, je possédais de tels revenus que plus personne ne pouvait sérieusement s'opposer à moi ; fin de la partie. C'est là que le problème du Vortex apparaît.

Les rituels sont longs à accomplir, très longs : le dernier prend ainsi 20 tours. Dans une optique de course, ce n'est pas un réel problème, puisque cela permet d'anticiper la progression adverse. Cependant, une fois les ennemis réels vaincus, cela signifie qu'il faut un grand nombre de tours avant que la campagne ne se termine, quand bien même toute difficulté aurait disparu depuis longtemps. Cette lenteur est très frustrante et conclut le jeu sur une mauvaise impression, ce qui est extrêmement dommage. Ce problème de rythme gâche toute la bonne volonté de Creative Assembly et cette mécanique pourtant prometteuse.

Gigantic

Heureusement, depuis jeudi 19h00, le problème est réglé. En effet, plus personne n'a de raison de jouer en campagne vortex depuis l'apparition de la campagne Mortal Empires. Cette dernière rassemble les factions des deux jeux sur une carte gigantesque, entièrement repensée pour l'occasion. Il ne s'agit pas d'une simple fusion des deux cartes, puisque certains territoires ont été modifiés pour que tout s'emboîte au mieux. À ce titre et après quelques jours de jeu sur la nouvelle carte, le travail semble avoir été très bien fait.

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Néanmoins, tout n'est pas encore finalisé. Comme le dit bien la note de patch, Norsca n'est pas encore jouable et les dernières mises à jour pour le premier jeu ne sont pas encore effectives. Quelques bugs ont également été relevés. Tout n'est donc pas parfait, mais cette campagne promet énormément et devrait gommer le défaut majeur que représente la campagne du Vortex.

Le juste prix

Précisons cependant que pour accéder à cette grande campagne, il est nécessaire de posséder les deux jeux. À l'heure actuelle, l'addition du prix des deux jeux et des DLC du premier frise déjà les 200€ hors soldes ; ce tarif devrait augmenter avec la sortie du troisième et dernier opus de la trilogie ainsi qu'avec les DLC à venir. Le prix total a donc de quoi effrayer et provoque déjà l'indignation de certains joueurs.

Pour répondre à cela, je ne vous dirai pas que c'est une expérience incroyable et bla, bla, bla. Je préfère l'argument du contenu : pour ce prix, le joueur dispose de 13 factions réellement différentes, renouvelant entièrement l'expérience. En somme et à titre personnel, je préfère voir dans ce tarif un regroupement très attractif de 13 jeux réellement distincts et hautement qualitatifs plutôt qu'un investissement démesuré. J'avais fait l'impasse sur Attila, peu persuadé par la proposition, mais je suis convaincu de la pertinence de chaque centime investi dans Total War : Warhammer, à de rares exceptions près : les deux DLC ajoutant des unités supplémentaires et le pack sanglant. J'ai réellement apprécié chaque nouvelle faction ajoutée et trouve que le prix est toujours à la hauteur du contenu proposé ; j'irais même ajouter que si je n'avais évidemment pas réfléchi au modèle économique lors de l'annonce du partenariat entre Sega et Games Workshop en 2012, le contenu correspond parfaitement à mon niveau d'attente et que j'en accepte sans difficulté le prix. Je préfère largement cela à des factions moins conformes à ce qu'elles sont dans le jeu de figurines ou à la certitude que certaines n'arriveront jamais.

Toutefois, loin de moi l'idée de prétendre que cette opinion est la seule possible, surtout que, comme vous pouvez toujours le noter de manière transparente, mes tests sont faits à partir d'une version fournie par l'éditeur, ce qui signifie que je n'ai eu à passer à la caisse que pour les DLC d'unités évoqués plus tôt. L'avis peut donc sembler un peu hypocrite et je vous invite avant tout à vous faire le vôtre ; il est par exemple parfaitement possible d'attendre des soldes (le premier Total War : Warhammer est ainsi à moitié prix et ses DLC à -33% jusqu'au 30 octobre) ou de ne choisir que les DLC ajoutant les factions que vous préférez. Tout ce que je peux assurer, c'est que le contenu est au rendez-vous et correspond au prix demandé, que ce soit sur le plan quantitatif ou qualitatif.

GOTY II

Total War : Warhammer était mon jeu préféré de 2016. Grâce à des améliorations aussi nombreuses que notables et en dépit d'une concurrence bien plus forte cette année (citons notamment l'inattendu Agents of Mayhem, que Total War : Warhammer II a initialement eu bien du mal à me faire quitter), Total War : Warhammer II sera assurément mon jeu préféré de 2017. La campagne du Vortex est le gros point noir de ce deuxième opus, mais la campagne Mortal Empires offre bien mieux qu'un palliatif à ce problème.

Test réalisé par Alandring à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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