Test de John Wick Hex - La précision ou la mort

Adaptation de la saga cinématographique de Chad Stahelski et Derek Kolstad, John Wick Hex est un jeu tactique au tour par tour qui nous plonge dans les origines de la légende. Le jeu se déroule avant les événements du premier film ; John Wick tente de survivre à une vendetta lancée par un curieux ennemi, Hex. 

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Aut vincere, aut mori

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L'histoire du jeu est racontée par Charon, le concierge du Continental et Winston, le propriétaire. Ils sont accompagnés par Hex, un curieux bonhomme qui semble en vouloir à John Wick. Les trois racontent les exploits de John Wick alors qu'il progresse dans sa quête consistant à retrouver Hex. À la hauteur des films, ce bout d'histoire nous met dans l'ambiance et ne déroge pas à la règle établie au cinéma : John Wick tue tout le monde. Parlant du cinéma, le jeu se déroule avant les événements du premier film et on l'évacue rapidement : il n'y a pas de chien. Un bonus tout de fois, Ian McShane et Lance Reddick reprennent leurs rôles de Winston et Charon en donnant leurs voix au jeu.

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John Wick Hex a tout pour nous surprendre : ce n'est pas un jeu d'action, alors qu'on aurait pu s'attendre à un jeu de tir à la troisième personne plus classique. Ici, le jeu imaginé par Mike Bithell (développeur de Thomas was alone, Volume) est un tactical, un jeu où on se déplace sur des lignes en pointillés pour planifier nos actions. Dans un tour par tour frénétique, le jeu nous oblige à prévoir les conséquences de chacun de nos gestes afin d'éliminer les ennemis de chaque niveau pour en voir le bout. L'objectif principal est d'éliminer les gardes avant qu'ils aient le temps de tirer, car le jeu est curieusement moins permissif que le film et ses costumes pare-balles. Dans John Wick Hex, il suffit de se faire tirer dessus deux ou trois fois pour mourir, voire même une seule fois face aux ennemis les mieux armés. L'action tourne autour d'une ligne du temps qu'il faut surveiller constamment. Affichée en haut de l'écran, cette barre nous montre combien de temps nécessite chacune de nos actions avant que l'on décide de les valider. Elle affiche également les actions à venir des ennemis dans notre champ de vision. Le jeu n'est donc fait que de choix : ramasser une arme peut être salvateur pour les prochains tours, mais cela prend du temps alors qu'un ennemi s'approche. Au contraire, tirer de loin peut nous débarrasser d'une menace immédiate, mais le risque de rater notre cible à longue distance peut nous mettre dans l'embarras. Il faut aussi prendre en compte les classes d'ennemis : combattants au corps à corps, gardes armés, gardes renforcés (avec gilet pare-balles et plus de points de vie) ou encore gros bourrins équipés de fusils à pompe. Surveiller leur équipement est d'ailleurs essentiel, car si un ennemi équipé d'une petite mitraillette n'a que peu de chances de toucher à longue distance, un pistolet 9mm ou un fusil d'assaut peut nous avoir plus facilement. À côté, les ennemis équipes d'un fusil à pompe sont redoutables, car ils peuvent nous tuer en un coup s'ils se trouvent à courte distance. Le jeu nous oblige donc à faire un choix sur nos cibles ; quand on a au moins deux ennemis sont dans notre champ de vision, il faut non seulement analyser la barre de temps pour voir quel ennemi frappera le premier, mais également décider quelle cible il vaut mieux éliminer selon les armes et leurs positions. Sans oublier que certaines actions (corps à corps, esquive) nous coûtent des points de "concentration", qui se rechargent en se concentrant de temps à autre, perdant là aussi du temps.

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Heureusement, les ennemis tombent vite, la plupart en une attaque au 9mm ou en procédant à un assassinat au corps à corps, d'autres tombent en deux coups selon l'arme utilisée. Et c'est nécessaire, car le héros ne possède pas des dizaines de chargeurs sur lui. À l'image des scènes d'actions des films au cinéma, notre John Wick doit récupérer les armes des ennemis pour ne jamais en manquer. On échange donc constamment nos armes avec celles lâchées par nos ennemis, avec une poignée de balles à disposition (à l'exception de l'arme de départ de chaque zone qui possède un chargeur supplémentaire) pour progresser jusqu'à la fin. C'est un choix de game design pertinent qui permet non seulement de dynamiser l'action et de nous pousser à varier les armes en faisant avec les moyens du bord, mais également de planifier nos incursions dans chaque niveau. En effet, le jeu se divise en sept zones au début desquelles, à l'exception de deux, on utilise des pièces du Continental (les fameuses pièces de monnaie que s'échangent les protagonistes dans les films) pour obtenir divers bonus. Ces points permettent de glaner des bonus passifs, là-encore en renvoyant aux films avec leurs costumes, allant de l'augmentation de la barre de vie à l'augmentation de la portée. Ils débloquent également des bonus à installer dans chaque mission : on peut y dissimuler un bandage ou une arme précise. Cela permet de prévoir les moments où on aura besoin d'un soin ou d'une arme particulière, néanmoins le système trouve rapidement ses limites. Il est effectivement impossible de prévoir ce qu'on trouvera dans chaque niveau à la première run, alors on a souvent eu tendance à installer des bandages au pif en se disant que ça ne fait jamais de mal d'avoir un peu de vie en rab. La conséquence directe est que, hors coup de chance, on se retrouve souvent démuni face à l'adversité et on se rend vite compte que l'on n'a pas placé les bandages ou les armes au meilleur endroit.

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Et c'est un vrai problème, car le jeu est extrêmement punitif et on conserve notre santé et notre arme d'une mission à l'autre au sein d'une même zone. Il n'est pas rare d'arriver face à une mission de boss en étant à poil, avec une arme peu chargée et aucun bandage disponible. Seul un miracle nous sort de là et ce miracle s'appelle aléatoire. Mais on y reviendra plus tard.
Les boss offrent quelques affrontements sympathiques, mais souffrent tous du même problème : les affronter consiste à répéter la même action en boucle. Les boss ont en effet une barre de concentration similaire à la notre qui leur permet d'esquiver ou de parer certaines actions, alors les combats de boss se résument souvent à s'approcher au corps à corps, enchaîner trois actions "assassiner" pour vider leur barre de concentration et les achever avec quelques tirs le temps qu'ils se relèvent. On en arrive à des affrontements assez grotesques, accentués par la fin qui nous propose de regarder notre mission en replay sans interruption. Si on aime la volonté cinématographique du truc, on doit avouer qu'on a plus tendance à se marrer en regardant les personnages se taper dessus au tour par tour sans la moindre intensité. 

John Weak

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Néanmoins, s'il faut retenir un problème pour John Wick Hex, c'est son aléatoire. Un aléatoire qui pourrit la deuxième partie du jeu. Si les deux ou trois premières zones se traversent sans trop d'encombre, la suite se révèle plus difficile avec un nombre d'ennemis accrus et l'apparition des gardes renforcés. Malheureusement, c'est aussi le moment où l'aspect tactique s'envole. On ne peut pas prévoir grand chose : seuls les ennemis dans notre champ de vision apparaissent à l'écran, tandis que ceux que l'on a repérés et qui se déplacent hors de notre vision sont symbolisés par une flèche. L'idée est bonne et émule parfaitement le cinéma où les dangers pour John Wick se trouvent à chaque recoin, profitant de sa précision et de ses réflexes pour survivre. Toutefois, pour un jeu tactique, le système trouve ses limites dès lors que l'on y instille de l'aléatoire. Avec ses tendances de die & retry, le jeu laisse croire que l'on peut mémoriser le placement des ennemis pour s'en défaire à la prochaine tentative, mais il n'en est rien. Bien que certains ennemis soient scriptés et apparaissent toujours au même endroit, la plupart d'entre eux se déplacent et apparaissent de manière très aléatoire. Certains combats, notamment ceux où l'on arrive avec peu de points de vie sur une zone très chargée, ne deviennent jouables que lorsque le jeu nous propose une run plus simple avec des ennemis mieux placés pour que l'on puisse les enchaîner sans se faire toucher. Cet aléatoire est à double tranchant : chaque run est différente et offre un challenge relevé, mais au contraire des missions paraissent parfois trop simples, car le jeu ne nous a envoyé que des ennemis de base. Il nous est même arrivé de traverser une mission avec, pratiquement, que des combattants au corps à corps. Des ennemis qu'il est extrêmement simple de contrer, à tel point que nous n'avons jamais risqué de prendre un coup jusqu'à la fin de la mission. Au contraire, il nous est arrivé d'enchaîner des ennemis lourds, sur-armés, et de mourir en boucle jusqu'à ce que l'aléatoire nous propose une run un peu plus douce. 

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D'autant plus que le jeu fait parfois peine à voir : ses animations sont rigides, il n'est pas toujours très fin graphiquement et souffre d'une mise en scène peu inspirée dans ses "replay" générés en fin de mission. Néanmoins, il serait bien dommage de nier le travail effectué sur la direction artistique. La rigidité générale est compensée par des visuels qui rappellent énormément le travail de Dan Laustsen, chef opérateur sur le deuxième film. Avec ses teintes roses ou bleues, ses jeux d'ombres et ses éclairages, le jeu s'en inspire énormément et nous plonge dans des nuits d'une violence inouïe qui rappellent les passionnantes scènes d'action des films. Le studio de Mike Bithell a effectué un excellent boulot là-dessus, permettant aux amateurs des films de trouver sans mal ce qui faisait tout le plaisir de la saga. On osera même : John Wick Hex est un meilleur John Wick que le troisième film.

Conclusion

Particulièrement frustrant, John Wick Hex a tout d'un excellent jeu. Son aléatoire mine un excellent travail sur l'ambiance et le gameplay, proposant un jeu tactique qui repose un peu trop sur la chance. Cependant, le travail effectué sur la direction artistique et le plaisir procuré par une mission où tout se déroule sans encombre est inestimable. On sent que les développeurs aiment véritablement la saga John Wick et ils lui ont rendu honneur, même si seuls les plus acharnés iront jusqu'au bout d'un jeu qui peine à récompenser le sens tactique de ses joueurs plutôt que leur chance face à l'aléatoire. 

Test réalisé par Hachim0n sur PC à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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