Test de Final Fantasy VI Pixel Remaster - Pixel Perfect ?

Si Final Fantasy VI est un des jeux les plus mythiques de la Super NES, c'est parce qu'il traite avec autant d'originalité que de créativité des thèmes profonds et matures, toujours très actuels. On y incarne l'esclave Terra et ses compagnons qui font face à un ignoble empire.

Cette mouture Pixel Remaster propose de remettre au gout du jour un des plus grands Classiques du jeu vidéo, et si on prendra dans ce test le temps de chipoter sur certains détails, considérez que pour la majorité des joueurs, c'est la meilleure version du jeu à l'heure actuelle. Si vous n'avez jamais joué à ce jeu, ou si vous n'avez jamais joué à Final Fantasy, c'est par là qu'il faut commencer.

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Un drame Kefkaien

Le fait d'avoir entamé une partie de Final Fantasy VI alors qu'une invasion se déclenchait à nos portes m'a sans doute permis de prendre conscience à quel point la narration du titre était juste, et profonde. Je connais bien Final Fantasy VI, c'est un jeu qui m'accompagne depuis des années, pourtant je n'avais jamais fait un parallèle aussi glaçant entre ce jeu et l'horreur de l'actualité. La puissance évocatrice du titre est tout simplement hors du commun. Des thèmes comme la destruction de la terre par la folie d'un homme, les forces de la nature ou la conjonction des deux, pourtant très marqués dans l'imaginaire japonais des années 90 - dans lequel je baigne depuis maintenant un certain temps - prennent une tout autre dimension quand les récits menacent de devenir des faits.

La première partie de Final Fantasy VI nous raconte véritablement une guerre. Tout commence par une invasion, puis des conquêtes territoriales, des résistances, des actes de barbarie, des mises à mort... j'en passe et des pires. Le joueur est mis face aux ambitions impérialistes de l'empereur Ghestal ainsi qu'aux méthodes déloyales de Kefka son homme de main sociopathe au gloussement de rire glaçant. Bien sûr, Final Fantasy VI est et reste avant tout un divertissement. Les péripéties comme la bonne humeur de nos héros au milieu de ce monde en proie au chaos apportent avec humour la touche de légèreté nécessaire pour dépeindre avec la simplicité des moyens de l'époque - c'est-à-dire peu de mots et beaucoup d'émotions - certains drames très poignants. La seconde partie du jeu nous met quant à elle face aux conséquences de la folie d'un homme pourvu d'un pouvoir sans comparaison et on souhaite tous que l'œuvre d'art reste ce qu'elle devrait être : un avertissement.

Le génie de ce scénario, c'est ce dosage qui permet aux publics de tous âges de retirer quelque chose de l'histoire. On a vraiment plusieurs niveaux de lecture. Il y a un monde entre moi et mon frangin qui, enfants, partions à l'aventure dans un univers sauvage, affrontant des monstres mythiques, vivant des péripéties aussi originales que bien rythmées, et mon regard d'adulte qui mesure la profondeur de certains thèmes ainsi que la justesse avec lesquels ils sont brossés, que ce soit en quelques lignes ou par une narration environnementale aussi efficace qu'innovante pour l'époque. C'est dans les petits détails que se trouve la richesse de Final Fantasy VI, une maison en ruines, un village abandonné par les jeunes partis à la guerre, des soldats qui organisent des combats de chiens dans les rues pour tuer le temps ou des messages entre amoureux séparés envoyés par pigeon voyageur… les situations ne manquent pas et les villes sont suffisamment compactes pour permettre de parler à tous les PNJs afin de prendre la mesure de la richesse de l'univers. D'autant que le joueur n'est pas que passif, il peut s'impliquer dans certains évènements.

L'autre richesse de narration de Final Fantasy VI, ce sont ses héros et la façon dont ces individualités se dépatouillent avec leurs propres épreuves dans un contexte qui les submerge. Paradoxalement, malgré nos victoires sur le scénario, malgré nos succès en combats, malgré nos avatars qui deviennent de plus en plus puissants comme dans tous les RPGs, Final Fantasy VI parle surtout des défaites de nos personnages. L'anecdote veut que chaque membre de l'équipe de développement ait créé son propre avatar - ce qui a conduit à proposer une riche galerie de personnalités crédibles - afin de les mettre chacun face à la grande Histoire du monde. On se retrouve donc à la tête de héros aux parcours aussi divers que brisés : esclaves, enfants abandonnés, fraternités séparées, personnes trompées, enthousiastes en grande souffrance et frimeurs cachant un profond désespoir sont votre quotidien. Si la plupart du temps le jeu manie admirablement bien l'humour pour rester léger, certains passages sont émotionnellement très intenses et savent en outre imbriquer les actions du joueur et la narration pour renforcer notre implication.

Chaque personnage a son arc scénaristique plus ou moins étoffé, mais aussi partiellement optionnel. En visitant une zone avec les bons équipiers, vous pouvez déclencher des cinématiques supplémentaires qui permettent d'en apprendre plus sur les membres de votre groupe. Si certaines sont assez évidentes, d'autres demandent plus de subtilité et d'esprit de déduction. Il est possible de totalement passer à côté de pans entiers des histoires de chacun. C'est donc à vous de chercher à remonter le fil des indices, parfois évidents, parfois cachés jusque dans les pièces d'équipement, si bien sûr les récits vous intéressent. Rassurez-vous quand même, à quelques exceptions près vous pouvez déclencher toutes les cinématiques majeures à n'importe quel moment du jeu.

Vous l'aurez sans doute compris, Final Fantasy VI ne met pas en place un héros entouré de second rôles, l'idée ici est que n'importe quel personnage est le héros de son histoire. On trouve ainsi des portraits simples, mais surtout très justes auxquels chaque joueur peut plus ou moins s'identifier. Si au début la composition de notre équipe est imposée, très rapidement c'est à vous de décider quel avatar jouer, et autant vous dire que vous aurez rapidement vos chouchous, et que ce sera un drame quand on vous les retirera. En effet, si la première partie du jeu vous fait découvrir le monde façon relativement dirigée, un twist scénaristique renouvelle ensuite totalement l'aventure. Le jeu s'ouvre alors complètement, et si je n'irais pas jusqu'à parler de monde ouvert, je tiens à noter qu'en 1994 on pouvait déjà se contenter de récupérer le dirigeable avant d'aller tenter sa chance à poil contre le boss de fin.

Bien entendu, l'intérêt principal de cette seconde partie est plutôt d'explorer tout l'univers qui s'offre à nous. Cette proposition est particulièrement aboutie, car on ne vadrouille pas dans l'inconnu, mais on redécouvre un monde qu'on a appris à connaître pendant 15 à 20 heures de jeu. C'est à ce point qu'on réalise que la première partie a vraiment servi à tisser un lien entre le joueur et l'univers de Final Fantasy VI. Ce monde, nous l'avons parcouru, nous y avons vécu des aventures, des drames, et nous connaissons ses villes comme ses personnages. Ce monde, c'est un peu notre monde et nous y sommes attachés, ce qui rend l'expérience plus poignante. Le fait de re-parcourir, de re-découvrir - que ce soient les zones transfigurées ou les nouveaux endroits accessibles est une expérience aussi rare que précieuse dans un jeu vidéo.  À ce point, la quête principale devient quasiment absente, n'étant plus qu'une trame de fond plaçant au premier plan les histoires des personnages et les émotions. C'est l'occasion de clore les arcs narratifs des différents membres de votre groupe dans un mélange de récit et de gameplay abouti. C'est cette mise en œuvre aussi riche qu'originale pour l'époque, qui mise sur la relation du joueur avec le monde et avec ses héros qui a conféré au titre son aura de monstre sacré - et qui en fait toujours un jeu aussi remarquable qu'indispensable de nos jours.

Classes de lutte

Au-delà de cet univers et cette narration admirable, le gameplay s'inscrit dans la continuité des opus précédents. Il se distingue principalement par le peaufinage de son classicisme mâtiné de petites originalités. On est toujours sur de l'investigation de donjons avec des trésors cachés, des combats aléatoires, des points de sauvegarde et des gros boss qui font parfois mal. Le récit s'invite souvent dans l'exploration, que ce soit pour faire avancer l'histoire ou apporter une touche d'humour, évitant la routine. Le titre se distingue par la créativité et l'originalité de ses environnements, notamment dans la première partie, voire rebat les cartes des poncifs habituels pour nous faire commencer par une ville enneigée puis nous emmener ensuite dans le désert, plutôt que de nous faire traverser des caves et des plaines. De la même façon, les lieux emblématiques du jeu vidéo sont remaniés intelligemment, mais je vais éviter d'en dresser la liste pour ne pas gâcher la surprise de ceux qui n'ont pas encore découvert le jeu.

On trouve également des passages de gameplay plus originaux, certains très réussis comme ces phases de défense de camp où l'on dirige plusieurs équipes contre des hordes adverses qui avancent sur nous, des pseudo phases d’infiltration et même des donjons dans lesquels il faut diriger plusieurs équipes à la fois ou encore des passages en radeau qui ne nous privent de pauses entre les combats. Le jeu original tentait d'utiliser le mode 7 de la SNES pour nous faire vivre des aventures sous-marines ou en wagonnet pas franchement abouties et si le pixel remaster rend la chose visuellement plus supportable pour la partie sur rails, ces courts passages restent sans grand intérêt.

Contrairement aux épisodes précédents, le système de classes est beaucoup moins mis en avant, même si des titres - qui n'étaient pas présents sur SNES - sont apparus. Les personnages sont interchangeables et s'ils sont tous fonctionnels, ils ne sont pas pour autant égaux. Ce qui se remarque le plus, c'est que chacun a une commande spéciale et unique faisant varier leur gameplay. Par exemple, Setzer le flambeur peut faire tourner un bandit manchot pour lancer des coups spéciaux, Edgar l'ingénieur utilise des outils de chantier aux compétences spécifiques à condition de les avoir achetés ou trouvés, Sabin le moine invoque des techniques de jujitsu magiques en échange d'un petit combo au pad et Strago le mage bleu doit d'abord apprendre les sorts des monstres pour ensuite les réutiliser.

C'est très sympa, car chaque personnage propose un gameplay totalement différent, lié en plus à sa personnalité et son histoire. Le joueur peut ainsi façonner l'équipe dont le style lui convient le plus. On le voit au travers des quatre exemples ci-dessus, certains avatars demandent plus de temps et d'investissement pour tirer le maximum de leurs capacités que d'autres, parfois sans jamais réussir à égaler des compétences totalement dévastatrices - pour ne pas dire cheatées - des premiers, mais il n'y a pas de problème d'équilibrage pour autant.

Le point primordial, c'est la liberté donnée au joueur de former des équipes avec tous les personnages - et même d'en laisser de côté certains si vous ne les aimez pas. On peut choisir de rester avec une équipe à peu près fixe si on le souhaite, de faire des teams guerriers/mages très classiques, mais on peut aussi s'amuser à changer régulièrement, à utiliser des personnages aux compétences aléatoirement puissantes ou à faire des équipes qu'on ne contrôle même pas, que ce soit pour renouveler le gameplay, pour trouver des combos dévastateurs ou encore recoller les morceaux éparpillés du scénario. On peut facilement partager l'équipement entre les 14 personnages et rééquiper ses héros en une poignée de secondes, tous les changements sont aussi fluides que naturels. Il y a autant de façons de jouer à Final Fantasy VI qu'il y a de joueurs et d'humeurs, donc le principal est d'expérimenter pour trouver la façon de jouer qui vous fait plaisir.

Au-delà de leurs coups spéciaux, les protagonistes se distinguent par les équipements qu'ils peuvent porter. On trouve les habituelles armures légères/lourdes ainsi que les types d'armes spécifiques à certains personnages, mais aussi et surtout les reliques qui permettent de transformer plusieurs compétences natives, voire de les rendre les membres de votre équipe de plus en plus cheatés. Vous n'avez que deux emplacements de reliques par avatar, il faut donc faire des choix, mais arrivé à la fin du jeu vous avez des membres surpuissants qui lancent 8 attaques d'affilée ou qui font deux sorts de magie pour le coup dérisoire de 1mp - pour les options les plus simples.

Une fois le premier quart du jeu franchi, tous les personnages ont accès au système de magie. Chaque avatar peut équiper un magilithe, qui lui permet à la fois de lancer une invocation par combat, mais aussi d'apprendre diverses magies à chaque victoire et même de renforcer certaines stats lors d'un changement de niveau. Si une partie des magilithes arrive naturellement dans l'histoire, il faut savoir sortir du chemin pour mettre la main sur les invocations les plus puissantes qui apprennent également les sorts les plus dévastateurs. Ce système est très versatile, plus vous jouez un personnage et plus il apprend de magies. S'il n'est pas nécessaire de pousser le vice jusqu'à changer de magicite avant chaque level up pour donner des bonus spécifiques à chacun, les joueurs les plus pointilleux n'y manqueront pas, d'autant que l'écran de fin d'affrontement nous indique maintenant les points d'xp restants avant de changer de niveau.

Dans l'ensemble, les combats sont plutôt faciles, le joueur peut paramétrer à peu près tout ce qu'il veut, accéder à beaucoup de personnages puissants assez naturellement et se défaire simplement des boss s'il prend le temps d'ajuster les reliques ou de sortir les bons sorts ou d'abuser des bonnes techniques. Le but du jeu est vraiment de créer des avatars surpuissants pour rouler sur la faune locale et cette sensation est renforcée par les options de confort ajoutées au Pixel Remaster. Certaines compétences ont été légèrement revues, comme celle de Cyan le samouraï qui charge ses techniques de Bushido en arrière-plan au lieu de bloquer les commandes de toute l'équipe ou la commande de peinture de Relm qui fonctionne à présent et ponctionne allègrement vos MPs. D'autres simplifications sont carrément abusées : s'il est sympa de lister à l'écran les commandes façon jeu de baston des Jujitsu de Sabin pour éviter de tout connaitre par cœur, le jeu nous indique à présent si nos inputs sont bons et nous permet même de recommencer, alors que le rapport attaque surpuissante/commande difficile à rentrer - donc qui rate parfois - était au centre du gameplay du moine. Idem pour Setzer, le combat automatique vous fait réussir quasiment tous les Jackpots - mieux que vous ne le feriez à moins d'être un expert du speedrun, mais supprimant aussi pour les pros du pad la capacité de choisir précisément chaque roue. Encore une fois, tous les personnages sont valables, tous les personnages peuvent devenir surpuissants, donc ne vous sentez pas bloqués dans un carcan et surtout amusez-vous comme vous aimez.


Le Pixel Remaster qui donne un coup de ballet

Square Enix avait annoncé en grande pompe vouloir remettre en lumière l'iconique scène de l'opéra en utilisant le style HD-2D d'Octopath Traveler et Triangle Strategy. C'est un flop total qui permet de se rendre compte à quel point la technique du studio Acquire n'est pas qu'une mise en profondeur d'assets prévus pour un affichage à plat. Alors bien entendu, il y a une nécessité de coller au matériau d'origine, de ne pas trop dépareiller du reste du jeu et on peut considérer que dans la réalité l'opéra est aussi un monde de décors, toutefois l'expérience ici relève plus du carton-pâte que du bon coup de patte. On reviendra dans les musiques en détail plus bas, mais le passage de l'opéra, chanté en toutes langues par des chanteurs pour le moins inégaux, nous a laissé sans voix tant l'atterrissage est dur.

Un opéra dans un jeu vidéo sur Super Nintendo, ou même sur GBA, avec des chants en "Wah Wah" et des orchestrations en chiptunes, des parallaxes de décors, pour l'époque c'était tout simplement aussi impensable qu'incroyable. Sauf que quand les contraintes techniques sautent - comme c'est le cas ici - on voit toutes les limites et les coutures craquent de partout. On est à des lieues d'un opéra et on est à des lieues de ce qu'un jeu vidéo peut proposer en termes d'opéra. Malgré le ton humoristique de cette séquence, sa transposition est un véritable coup de massue sur des souvenirs magiques. D'ailleurs, la dernière partie de ce test tourne principalement autour de cette question : est-ce que le remaster apporte encore quelque chose à l'original ? Est-ce que vous êtes en mesure d'aimer cette proposition ? Cette réponse dépendra vraiment de l'expérience de chacun et tient plus à votre vécu qu'à la qualité du portage.

Plus on avance dans les épisodes et moins les avancées sont notables par rapport aux premières moutures, tandis que les défauts de cette collection Pixel Remaster perdurent voire s'aggravent. On re-citera en vrac pour ne pas s'y attarder une police d'écriture ni lisible ni esthétique - que vous pourrez changer sur PC contre un petit bidouillage, une refonte des menus qui rajoute des étapes de navigation, des problèmes de tearing et un filtre analogique plus flou qu'un astigmatisme non-corrigé. Plus énervant, et plus problématique, le curseur des magies qui fait n’importe quoi dans le ciblage multiple en combat si vous activez l’option mémoire. Le tri fonctionnel des magies qu'on trouve sur SNES a disparu, l'affichage n’est plus homogène entre les persos et ne permet pas un défilement simple. De plus, le curseur se défile s'il faut descendre la fenêtre. À chaque fois, les Pixel Remaster ratent un truc évident dans l'ergonomie, qui était réussi dans le jeu original. C'est toujours aussi désolant qu'incompréhensible.

En échange, on gagne des options de confort, certaines très utiles telle la possibilité de marcher rapidement, la gestion de l'équipement qui détaille clairement tous les objets ou la possibilité de mettre les combats en automatique - ce qui permet d'en accélérer la vitesse. D'autres sont fort pratiques comme la sauvegarde automatique à chaque changement de zone ou même la possibilité de sauvegarder quand on veut. L'équilibrage ne semble à première vue pas avoir été touché et la traduction se base sur celle de GBA gagnant en normalisation ce qu'elle perd en originalité. Le jeu est intégralement disponible en Français, avec un doublage vocal sur la partie chantée, mais vous pourrez aussi profiter des subtilités d'une dizaine de langues.


Pour autant, c'est l'aspect artistique qui apparaît de prime abord et si l'on peut reconnaitre les efforts faits pour proposer un rendu en pixel art moderne, on constate que la différence avec l'original n'est finalement pas si flagrante que ça. Il faut dire que le jeu sur SNES était déjà somptueux à l'époque et qu'il a très bien vieilli, au point que les sprites des ennemis n'ont dans l'ensemble pas été retouchés - exception faite de quelques boss iconiques. Je suppose que l'appréciation visuelle variera en fonction de l'attachement de chacun au jeu d'origine et à son nombre de parties. Si vous n'avez jamais lancé Final Fantasy VI, on est face à du pixel art moderne tout à fait appréciable. Si vous n'avez pas joué à Final Fantasy VI depuis plus de 15 ans, le rendu fera le taff et la nostalgie comblera le reste.

Par contre, si vous êtes du genre à refaire le jeu tous les deux ans, vous tiquerez forcément sur les décors vectorisés et pas en Pixel Perfect, sur le choix de recouper l'image en 16/9 au lieu de l'étendre (réduisant ainsi le champ de vision comparé à la SNES) et sur les sprites trop grands en mode exploration... sans que ça gâche pour autant l'expérience. Au niveau des environnements, il y a à boire et à manger. Si certaines zones iconiques ont gagné en allure, d'autres sont loin de transcender ou même d'égaler les originales. Je trouve notamment la carte du monde aux couleurs trop vives plutôt incohérente. C'est sur les écrans de combat que le titre propose une amélioration visuelle notable, avec des décors aussi soignés que réussis, ainsi que des effets magiques qui respectent le modèle tout en améliorant le rendu. On déplore également le grand retour de la censure, pas dramatique quand on cache les fesses d'une invocation, plus problématique quand un prisonnier enchainé et roué de coups devient un simple sprite planté comme un bâton. S'il est vrai que je préfère largement le rendu du jeu sur ma SNES Mini et davantage encore sur une bonne vieille télé cathodique (voie que je vous encourage à explorer) et que je pinaille sur certains détails qui me chagrinent, il faut reconnaître que l'aspect visuel de ce pixel remaster est réussi et conviendra aux attentes de la plupart des joueurs.

Les réorchestrations symphoniques supervisées par Uematsu sont, comme pour les précédents Pixel Remaster, des plus abouties. À quelques exceptions près, toutes trouvent le bon équilibre entre respect de la tradition et subtiles originalités ou déséquilibrages exquis. Je ne doute pas que certaines vous mettront la larme à l'œil et on rêve comme toujours d'un CD voire d'un vinyle contenant toutes les reprises de cette série. Ambiances feutrées et jazzy à Narshe, cuivres épiques dans les scènes de combat, crescendo aussi diaboliquement délirant que glaçant pour le thème du larbin psychopathe de service, guimbardes et pipeau aux tonalités western dans l'improbable thème musical d'un Ninja solitaire, ambiance à la fois intime, mais dramatique pour le train fantôme... tout est absolument réussi. On notera toutefois un peu moins de prises de risque musicales qu'avec les réorchestrations des opus précédents. D'ailleurs, on peut étendre cette remarque à l'ensemble du jeu. Est-ce parce qu'il ne fallait pas trop déstabiliser le joueur ou parce que l'équilibre était déjà atteint ?

Final Fantasy VI est un jeu exceptionnel ! Si vous n'y avez jamais joué ou même si vous ne connaissez pas Final Fantasy, alors sautez le pas avec le Pixel Remaster sans la moindre hésitation ! La narration, très avant-gardiste, subtilement centrée sur le monde et les personnages n'a pas pris une ride, la direction artistique est admirable, l'exploration est aussi plaisante que diversifiée, les systèmes de combat et de jeu sont aussi dynamiques qu'abordables et offrent au joueur à la fois liberté et créativité, les graphismes sont très aboutis, comme la bande son aussi remarquable que sublimée. On vit une grande aventure, on se distrait, on s'amuse, on réfléchit, tous les ingrédients sont là et parfaitement dosés - si vous avez des gamins mettez ce jeu entre leurs petites mains.

Final Fantasy VI fait partie du panthéon du RPG, et ce Pixel Remaster est une bien belle option pour s'y mettre ou s'y remettre. Le seul point qui me chagrine, c'est que ce remake ne soit pas à la hauteur de mes souvenirs, mais qu'importe puisque le remaster est à la hauteur de sa propre légende - celle d'un jeu intemporel à même de traverser toutes les générations de joueurs sans jamais décevoir.

Dernier point, on apprécierait grandement que la série des Pixel Remaster s'attaque à présent aux épisodes PlayStation qui mériteraient eux aussi un relooking en pixel art et des réorchestrations magistrales.

Testé par Oulanbator sur PC via une version de test fournie par l'éditeur.

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