Aperçu de Humankind - La guerre, c'est très surfait

Un an après, je suis retourné sur Humankind, avec l'opportunité d'expérimenter une civilisation plus avancée. Mon premier contact était "très positif". Qu'en est-il du second ?

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Grow Up

Cette fois-ci, ma partie s'est presque exclusivement concentrée sur un seul aspect : la guerre. En effet, dans une sauvegarde pré-existante située à l'ère industrielle (cinquième période du jeu), j'étais par défaut en guerre contre deux factions. Cela a fait apparaître un certain nombre de problèmes majeurs, que je n'avais pas rencontrés à l'époque.

Tout d'abord, la production. On le sait, Amplitude désire limiter le nombre de villes, notamment en permettant de les regrouper, afin d'éviter qu'un joueur ne doive gérer plus d'une dizaine de cités. C'est un objectif louable et pleinement compréhensible, mais dont la réalisation était surtout source de frustration dans cette partie. En effet, pour que cette limite soit équilibrée, il faudrait que la production soit adaptée en conséquence. En l'occurrence, je ne possédais au départ que deux villes et produire une unité militaire contemporaine prenait 9 tours par unité. Or, les unités peuvent  former des régiments regroupant plusieurs d'entre elles ; c'est même un passage obligé si l'on désire réellement se battre. Si j'avais souhaité obtenir cinq exemplaires d'une même unité afin de les rassembler, cela aurait donc occupé une de mes deux villes pendant 45 tours... Inenvisageable, évidemment, ne serait-ce que parce que l'ennemi n'attendra pas patiemment pendant aussi longtemps.

C'est d'autant plus impensable que pour passer à l'ère suivante - ce qui permet de changer de civilisation, un des principes des base du jeu -, il est nécessaire de récolter un certain nombre d'étoiles. Celles-ci peuvent être obtenues de plusieurs façons. Ou, plutôt, celles-ci DOIVENT être obtenues de plusieurs façons : il n'est par exemple possible que d'en obtenir que deux par la guerre. Cela punit donc tout joueur cherchant à se spécialiser dans un domaine, en le ralentissant volontairement. Or, avec un nombre réduit de villes, il est impossible d'être réellement généraliste. Dans Civilization, on crée une ville scientifique, une ville militaire, une ville religieuse, etc. Dans Humankind, on est obligé d'être touche-à-tout, ce qui est frustrant.

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Total War

Heureusement, à défaut d'avoir une production intéressante, cette sauvegarde nous fournissait un nombre correct d'unités, permettant d'expérimenter les batailles de grande échelle, absentes de la version testée l'an passé. En effet, c'était là la principale promesse d'Humankind, l'élément qui devait le différencier de Civilization : la possibilité de gérer des batailles tactiques, impliquant un grand nombre d'unités. Spoiler : le résultat a été extrêmement décevant. Sur le papier, il y a plein de bonnes idées. Dans la pratique, pourtant, la réalisation pêche sur trop d'aspects.

Commençons par les batailles en elles-mêmes. La perspective de batailles de grandes envergures, impliquant de nombreuses unités, était alléchante. Seulement, trois aspects empêchent pour l'heure d'en profiter. Tout d'abord, contrairement à la majorité des jeux de ce type, vaincre une unité ennemie ne signifie pas que l'on se déplace sur la case qu'elle occupait. Cela peut paraître stratégique - et ça l'est -, mais cela se combine très mal avec le level design du jeu. Celui-ci propose des zones surélevées, offrant différents bonus, ce qui est appréciable. Cependant, il offre aussi un grand nombre de cases difficilement accessibles et beaucoup de goulots d'étranglement. Concrètement, cela signifie qu'il suffit parfois à l'adversaire de placer une unité sur une case pour bloquer l'armée adverse. Il est alors impossible d'avancer puisqu'une unité tuée est toujours remplacée, en raison de l'élément évoqué plus tôt.

Les batailles pourraient être hautement stratégiques, riches en possibilités. Pour le moment, elles sont cependant assez soporifiques et, surtout, terriblement limitées. On rassemble une grande armée, mais une bonne partie des unités ne peuvent combattre en raison du relief et des limites de déplacement. Cependant, il y a encore pire : parfois, les batailles tournent au ridicule.

Un combat se déroule en trois rounds, chaque joueur utilisant ses unités trois fois, à tour de rôle. Puis, si le combat n'est pas terminé, c'est-à-dire si les deux joueurs ont encore des unités en vie, il s'interrompt provisoirement et reprend au tour suivant. Au total, une bataille peut durer jusqu'à six tours, ce qui permet potentiellement aux joueurs d'amener de nouvelles unités sur le champ de bataille. À nouveau, c'est une belle idée sur le papier, mais qui est mal réalisée.

Prenons un exemple concret. Au terme du siège d'une ville (nous en reparlerons), j'avais conquis, péniblement plus que difficilement, chaque case de la cité convoitée. Pourtant, la bataille ne s'est pas interrompue. En effet, il restait à l'ennemi une unité, présente je ne sais où. J'ai donc dû attendre la fin des six tours, alors que je n'avais plus rien à faire.

C'est le genre d'éléments extrêmement frustrants dont Humankind regorge. Prenons un autre exemple : quand une unité est attaquée, elle peut accepter le combat, mais aussi décider de fuir. Si elle fuit, elle ne subit aucun malus, tandis que l'assaillant perd quand même la totalité de ses points de mouvement. Heureusement, l'IA n'en abuse pas trop, mais ces problèmes condamnent les perspectives multijoueurs du titre, tant il semble possible d'en abuser pour ralentir un ennemi sensiblement plus fort que soi.

Resistance

Comme promis, abordons la conquête des villes. Celle-ci est intéressante. En effet, il est possible d'assiéger une cité ennemie, ce qui permet de créer des engins de sièges participant ensuite à la bataille. C'est une mécanique simple, mais très efficace. Seulement voilà : une fois la ville conquise, les choses se corsent.

Une ville ennemie conquise est considérée comme "occupée." Concrètement, cela signifie que la ville subit d'importants malus d'instabilité, faisant apparaître des rebelles de temps à autre, et, surtout, qu'il est impossible de s'en servir pour créer quoi que ce soit. Aussi, non seulement une ville conquise est inutile jusqu'au terme de la guerre, mais elle est en plus pénalisante puisqu'elle contraint à maintenir des unités sur place, sous peine de la perdre immédiatement face à des rebelles. 

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Pour que la guerre se termine, il faut amener le "support de la population" adverse zéro en remportant des victoires et en prenant des villes. Seulement voilà : comme je l'indiquais, dans ma partie j'étais confronté à deux adversaires, l'un étant vassal de l'autre. J'ai commencé par attaquer le vassal, plus proche de mes frontières. J'ai conquis deux de ses trois villes et annihilé ses armées. Seulement, comme il était vassal, il ne pouvait mettre un terme à la guerre, quel que soit son résultat.

Le système d'Humankind fonctionne donc probablement dans une guerre binaire, mais il était complètement inefficace dans ce cas. Je n'ose imaginer ce que donnent des conflits de plus grandes envergures, impliquant un nombre important de factions.

Au final, la conquête d'une ville n'offre au joueur qu'un terrible sentiment d'impuissance. Il ne peut construire des bâtiments pour réduire l'instabilité, ni raser la cité pour se débarrasser du problème d'une autre façon. Il peut laisser des unités sur place, mais cela l'empêche de poursuivre le conflit et donc de terminer la guerre...

This War of mine

Humankind est encore en cours de développement. Amplitude a par exemple indiqué être conscient du problème posé par la fuite et travailler à sa correction. Plus globalement, de nombreux équilibrages sont promis, dont une refonte complète de la diplomatie, bien trop obscure pour le moment.

En outre, il est possible que mon ressenti soit influencé par les conditions de test : j'ai été lancé directement dans l'ère industrielle, dans des conditions très insatisfaisantes. L'an passé, j'avais pu créer ma partie depuis le début ; peut-être que si j'avais pu la poursuivre, j'aurais trouvé la situation beaucoup plus appréciable.

De plus, la carte de campagne devrait être entièrement paramétrable. Ainsi, il sera peut-être possible de créer des cartes continentales avec peu de reliefs, supprimant les obstacles qui ont pourri mes batailles.

Il y a donc de nombreuses raisons d'espérer une issue favorable. Cependant, il y a aussi une sérieuse raison d'en douter : le temps. En effet, Humankind est prévu pour le 17 août 2021, soit dans moins de trois moins. Les développeurs d'Amplitude peuvent-ils parvenir à résoudre tous les problèmes dont souffre actuellement le jeu en si peu de temps ? Espérons-le.

L'an passé, j'indiquais qu'Humankind avait le potentiel d'être "le meilleur 4X." Il conserve assurément ce potentiel, le jeu étant bourré de bonnes idées. Cependant, pour l'heure, ce ne sont que ça : des idées. La mise en pratique est bien trop médiocre pour égaler Civilization, sans parler de le dépasser. Il faudra qu'Amplitude fasse beaucoup mieux pour réaliser ses ambitions.

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Aperçu réalisé sur PC par Alandring dans le cadre d'un événement presse virtuel organisé par le développeur.

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