Historique des MMOG #1 - Genèse

Rédigé par Uther, illustré par Favos
le 27 avril 2004

 

L'histoire des univers virtuels est intimement lié à l'histoire du jeu et plus largement à la création de mondes imaginaires. De Lewis Carroll (Alice au Pays des Merveilles) ou Jonathan Swift (le Voyage de Gulliver) à J.K. Rowling (Harry Potter) en passant par H.G. Wells (La Machine à Explorer le Temps) ou encore George Orwell (1984), la volonté de générer des mondes dans lesquels il sera possible de se projeter, n'est pas nouvelle.

illustrationMais avec le développement de la technologie, les jeux ont évolué pour devenir des programmes réticulaires comptant parfois des milliers de participants, interagissant les uns avec les autres dans le respect de règles du jeu.
Nous connaissons tous les jeux traditionnels en ligne (comme les jeux de cartes sur Internet). Aujourd'hui, le développement des univers virtuels persistants dans le cyberespace conduit à l'émergence de véritables sociétés virtuelles, riches de contenu et de relations sociales, qualifiées de "banlieue de la réalité" par Edward Castronova[1] lors du "State of Play", fin 2003. Plusieurs centaines de milliers d'individus interagissent quotidiennement ensemble dans ces espaces virtuels, selon des "règles de jeu" dynamiques et évolutives.
Les nouveaux environnements que représentent les univers virtuels persistants ne constituent pas uniquement de "nouveaux espaces de jeu". Ils s'accompagnent d'une culture propre, de la formation de sociétés réelles évoluant au rythme d'un corpus normatif créé par leurs "résidents"...

Ainsi, malgré les apparences, les jeux en ligne massivement multijoueurs (ou MMOG, Massively Multiplayers Online Games) semblent être le fruit d'un double processus très ancien lié à la notion de monde imaginaire et à la volonté des individus de se perdre dans ces univers.

 

1. Genèse : les univers imaginaires

     1.1. Simulations guerrières

La représentation du joueur dans l'univers de jeu par une figurine servant à l'identifier résulte de phénomènes très anciens et nombre de jeux[2] ont alors eu recours à la notion d'avatar (nous y reviendrons), c'est-à-dire l'incarnation symbolique représentant le "joueur" dans "l'espace de jeu".

illustrationDès 2500 avant JC, le Jeu Royal d'Ur (auquel on jouait dans la biblique cité "Ur de Sumer" à l'époque pré-chaldéenne) se définit comme le premier jeu de plateau[3] dans lequel le joueur est symbolisé par une figurine. Il faudra attendre plus de 2000 ans pour voir émerger les jeux tels qu'on les connaît aujourd'hui, prenant souvent la forme de simulations de stratégies guerrières. Les exemples les plus connus sont sans conteste le jeu de Go ou les Echecs (dont l'origine remonterait au Chaturanga hindou, littéralement "les quatre rois", illustrant une lutte militaire dans lequel quatre armées s'affrontent sur un échiquier de 64 cases afin de capturer les rois adverses et dont la création est attribuée à Sissa, philosophe et brahmane du nord de l'Inde, au Ve siècle[4]). Le concept évolue plus tard vers les "Echecs de guerre" et notamment le Köniegspiele[5] ou "jeu du Roi", attribué à Christophe Weikhmann dès 1664.

 

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1 Edward Castronova est directeur de recherche au département d'économie de Fullerton, Université d'Etat de Californie et auteur de l'essai "On virtual Economies".

2 Voir notamment "le guide en ligne des jeux traditionnels, histoire et informations utiles" (en anglais) : www.tradgames.org.uk/

3 Jeu de plateau : "Les jeux de plateau sont des jeux de société faisant intervenir plusieurs joueurs, dans un environnement défini (le plateau de jeu) et selon certaines règles préétablies. Parmi les jeux de plateau les plus connus, on trouve le Monopoly, le Scrabble ou le jeu de l'Oie" (définition inspirée de l'Encyclopédie Libre, Wikipédia).

4 Voir "Le guide des Echecs" de Nicolas Giffard et Alain Biénabe, éd. Robert Laffont.

5 Voir notamment "Entre histoire militaire et simulation, une contribution à l'étude de la décision" (Jean-Philippe Liardet, docteur en histoire militaire).