Test Dragon Quest Builders : à quand le prochain ?

Nouveau spin-off de la série déjà trentenaire des Dragon Quest, Dragon Quest Builder arrive enfin chez nous sur PlayStation 4 et Vita. Que vaut ce mélange audacieux entre J-RPG et Minecraft ? Tentative de réponse dans le test qui suit.

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Un mélange serviettes torchons

S’il y a quelques années on vous avait parlé d’un titre estampillé Dragon Quest reprenant les codes du jeu d’exploration, construction, survie, grandement popularisés par Minecraft, l’auriez-vous cru ? Nul doute que beaucoup auraient souri et d’autres auraient probablement crié au scandale, au massacre d’une licence mythique. Pourtant, c’est bien ce qu’est Dragon Quest Builders : un Minecraft dans l’univers de Dragon Quest, quand bien même l’équipe de développement assure que leur titre n'a rien à voir avec le jeu de Notch ; chacun se fera son opinion. On peut difficilement nier qu’un tel mélange intrigue et attise la curiosité aussi bien des fans de J-RPG que de Minecraft et autres ersatz. Comment résister à l’idée de vivre une expérience Dragon Quest dans un monde où notre imagination fertile peut s’exprimer ?

Annoncé pour la première fois en juillet 2015, Dragon Quest Builders devenait le premier jeu de la licence à ne pas être entièrement supervisé par Yuji Horii, papa de la série Dragon Quest et garant de son esprit depuis trente ans. De ce fait, nous étions en droit de faire preuve d’un léger scepticisme en voyant Kazuya Niinou et Noriyoshi Fujimoto aux commandes. Certes, ils ont un bagage non négligeable dans le domaine du jeu vidéo, mais l’absence de Yuji Horii et le regard des fans de Dragon Quest ne pouvaient que peser sur leurs épaules durant tout le développement.

Qu’en est-il dans les faits ?

L’histoire d’un maçon légendaire

Alefgard sombre sous l’obscurité du mal qui, sous le règne de Lordragon, a plongé le monde dans les ténèbres et a réduit l’humanité à quelques individus qui tentent tant bien que mal de survivre. Le temps a passé, les différentes cultures et les différents savoirs humains ont disparu au point de retomber à un âge proche de la préhistoire. C’est dans l’ignorance que ces survivants avancent en attendant l’arrivée du bâtisseur : celui ou celle qui reconstruira le monde comme le prédisent d’anciens textes prophétiques. C’est après un long sommeil que vous vous réveillez dans ce qui semble être un tombeau. Aidé d’une voix qui se prétend être une déesse souhaitant reconstruire Algfegard et ramener la lumière sur le monde, vous allez devoir mettre à profit vos talents et capacités pour répondre à ses attentes, car oui : vous êtes le bâtisseur.

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Lordragon, le grand méchant de l'histoire.

C’est ainsi que commence le mode histoire de Dragon Quest Builders. À défaut d’être très originale, l’histoire s’intègre parfaitement au genre popularisé par Minecraft. Puisqu’il faut construire, confectionner, inventer, imaginer, quoi de mieux qu’un bâtisseur, au centre d’un monde ayant perdu toute forme de culture et de savoir, pour y parvenir ?

Le jeu débute par le très limité système de création de personnages. Pas grand chose de disponible en dehors de la couleur des yeux, de la peau et des cheveux, mais vous avez au moins la possibilité de choisir le sexe de celui ou celle que vous dirigerez pendant les prochaines dizaines heures de jeu. Après avoir terminé les premières quêtes didactiques, vous voilà au seuil de ce qui deviendra la première ville où vous poserez votre étendard, qui servira de point de sauvegarde ainsi que de lieu de ralliement des habitants qui vous rejoindront au fur et à mesure. Ce sont ces derniers qui vous donneront des quêtes à accomplir pour faire évoluer votre ville ainsi que vos divers équipements en vous demandant d’aller récolter certaines matières premières, de construire une salle spécifique ou un outil de travail pour vous ouvrir de nouveaux horizons de construction. Sur le papier, le principe fonctionne et en jeu, cela passe aussi. Malheureusement, les quêtes qui s’enchainent semblent toutes se ressembler : trouver un nouveau matériau, aller parler à telle personne pour une nouvelle recette, confectionner tel ou tel objet, suivre un plan préalablement fourni pour construire une salle ou une fortification, ou repousser une vague de monstres, car oui, les attaques de monstres sur votre ville sont scriptées sous forme de quêtes. Si cela peut s’avérer sympathique au début, leur succession peut assez vite devenir répétitive. Et c’est sans compter sur les différentes personnalités qui habitent votre ville et qui se permettent de vous imposer leurs exigences avec la sympathie d’une porte de prison. Par chance, votre personnage, qui ne parle pas comme dans tout Dragon Quest, semble avoir son petit caractère et il n’est pas rare de voir les habitants réagir à ses réflexions un peu désobligeantes du personnage qui n’a rien demandé et à qui on en demande beaucoup, ce qui amène parfois à des scènes assez humoristiques.

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Quelques situations cocasses font sourire.

Durant votre périple, vous rencontrerez de nombreux personnages qui vous offriront généralement de nouvelles recettes, et là encore, vous aurez droit à quelques scènes assez marrantes, même si vous risquez de lever un sourcil face à des dialogues sous le niveau de la ceinture. C’est assez étonnant pour un Dragon Quest qui, certes, a toujours été écrit pour être appréhendé sous plusieurs angles, mais sans pour autant tomber dans du graveleux bas du front. Évitons malgré tout de tirer la sonnette d’alarme : c’est extrêmement peu fréquent et plus étonnant qu’autre chose.

Quant au scénario, il se développe davantage durant les rêves que votre personnage fait après avoir accompli certaines quêtes. Ceux-ci vous en apprennent plus sur ce qu’était le monde juste avant que Lordragon ne prenne le contrôle d’Alefgard. En parlant d’Alefgard, certains auront peut-être un petit moment de nostalgie en apprenant qu’il s’agit du monde dans lequel évoluent les trois premiers épisodes de la série Dragon Quest. L’histoire se laisse suivre et nul doute que vous souhaiterez régler son compte à cet infâme mécréant qui aura plongé le monde dans les ténèbres.

Mais Dragon Quest Builders, ce n’est pas qu’une histoire, c’est aussi un gameplay.

Croix, rond, triangle, carré !

Dragon Quest Builders se joue entièrement à la troisième personne, semblablement à n’importe quel J-RPG ou jeu d’aventure en 3D. Impossible de passer en vue à la première personne, ce qui entraîne quelques soucis de caméra lors de passages en intérieur ou dans des zones exigües comme lorsque vous creusez la roche en profondeur, par exemple. Les grandes différences avec les Dragon Quest classiques, ce sont l’absence de groupe, puisque vous jouez un seul et unique personnage, ainsi que la disparition des combats au tour par tour, bien connus des fans, au profit de combats en temps réel. Plus proche d’un Zelda, ce spin-off vous fait voyager dans différentes zones proposant plusieurs biomes parmi la forêt, la montagne ou encore le désert, intégrant chacun de nouveaux matériaux nécessaires à l’obtention de nouvelles recettes.

Ces dernières s’acquièrent de deux manières : via un PNJ ou en découvrant une nouvelle matière première. Elles vous permettent de créer une multitude d’objets dans de nombreux domaines. Vous pourrez ainsi cuisiner, forger, fabriquer un peu tout et n’importe quoi comme des barrières, des fenêtres, des armures, des armes, des murs, des braseros, des salades et bien d’autres tellement la liste est longue. Certes, les possibilités sont moins poussées que dans Minecraft, mais suffisamment vastes pour transformer et améliorer votre ville au fur et à mesure. Pour réaliser ces recettes, il vous faut bien entendu des matières premières que vous pouvez obtenir en parcourant les différentes îles.

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Vous pouvez accéder à votre coffre de n'importe où.

Comme dans tous les jeux du genre, il vous suffit de frapper avec votre marteau – ou votre épée, moins efficace - le sol, les parois, les arbres et autres pour casser des blocs et ainsi récupérer des ressources. La terre, le cuivre, le fer, le bois : tous les grands classiques sont présents et vous allez passer la majeure partie de votre temps à appuyer frénétiquement sur le bouton triangle pour obtenir ce dont vous avez besoin. Pourquoi le bouton triangle ? Parce que les développeurs ont eu l’étrange idée d’un mapping des boutons très différent de nos habitudes pour y intégrer toutes les fonctionnalités. Ici, le triangle sert à frapper, le rond à sauter, la croix à ouvrir le menu ou valider une action (parler, utiliser) et le carré à utiliser les objets que vous avez dans votre barre d’inventaire. Nul doute que bien des joueurs vont se tromper de bouton plus d’une fois avant d’intégrer ce système.

Autre souci, cette fois liée à la vue à la troisième personne, le placement des objets sur le terrain. La vue à la première personne a pour grande qualité la précision et passer à la troisième rend le placement des objets plus complexe. Vous avez droit à un marqueur vous précisant l’endroit où vous allez poser l’objet en question, mais il n’est pas toujours en face de vous ce qui peut entraîner quelques désagréments vous forçant à casser ce que vous venez de faire. Nullement un défaut rédhibitoire, cela demande un petit temps d’adaptation pour éviter les erreurs, surtout lorsque vous agencez votre ville.

Cette ville, justement, se compose de plusieurs pièces que vous allez construire comme bon vous semble. Toutefois, pour qu’elles soient considérées comme telles, il vous faut respecter certaines conditions. La première, c’est de dresser des murs de deux blocs de hauteur minimum. La seconde, c’est la présence d’une porte et la troisième, une source de lumière. Pour le reste, tout dépend de ce que vous souhaitez créer. Dans le cas d'une chambre individuelle, il vous faut obligatoirement un lit, un pot et une pancarte en plus des obligations précédemment citées. Peu importe la qualité, c’est une condition sine qua non pour que cette pièce devienne une chambre individuelle. Et ne pensez pas passer outre ces conditions, c’est ainsi que vous allez faire progresser votre ville. En effet, chaque pièce rapporte un certain nombre de points, qui augmentent en fonction de la qualité des objets utilisés ou encore des décorations disséminées çà et là, s’ajoutant à une barre d’expérience qui, à chaque niveau supplémentaire, permet de faire avancer l’histoire.

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Une petite ville à son niveau maximum.

Lorsque cela arrive, vous avez généralement accès à une quête de combat. Celle-ci lance une invasion de quelques monstres arrivant par vagues et attaquant votre ville pour la détruire. Afin d’éviter cela, vous allez devoir les combattre et consolider vos défenses. Autant le préciser tout de suite, les combats sont d’une grande simplicité puisque vous pouvez juste taper, utiliser un coup spécial, qui fera sourire les joueurs de Zelda, et profiter des quelques objets offensifs comme les bombes. Pas de magie, pas de classe de personnage, pas de bouclier à lever pour bloquer les coups. Si les batailles sont faciles, plus l’histoire avance, plus les monstres sont nombreux et impliquent des mini boss qui, une fois vaincus, peuvent lâcher un téléporteur donnant accès à une nouvelle île pour de nouveaux matériaux permettant d’améliorer la ville et d’avancer dans l’histoire pour de nouveaux combats et ainsi de suite jusqu’au moment fatidique du combat final contre un véritable boss. Terrasser ce dernier termine le chapitre et vous donne le droit de passer au suivant en vous téléportant vers une autre zone avec une autre ville à reconstruire, de nouveaux habitants et surtout un inventaire totalement vierge.

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Le premier vrai boss que vous rencontrerez.

À la fin du premier chapitre, vous allez aussi débloquer le mode libre dans lequel vous pouvez faire ce que vous voulez. Totalement séparé du mode histoire, il permet, entre autres, de partager vos créations ainsi que de télécharger celles de vos amis. Malheureusement, les zones de partage sont restreintes et représentent de petits carrés dans lesquels vous ne pouvez pas mettre grand-chose. Exit les cathédrales et autres créations majestueuses, ou du moins, exit la possibilité de les partager, car vous devriez choisir un lieu bien plus vaste que ce qui est proposé. Autre point gênant, le fait de terminer le premier chapitre débloque le mode libre, mais il vous faudra arriver au bout du mode histoire pour avoir accès à toutes les zones et à tous les matériaux et recettes. Cela permet aux joueurs de les découvrir dans le cadre du scénario du jeu, cependant cela réduit l’intérêt de proposer le mode libre après le premier chapitre. Mais ne crachons pas dans la soupe, la présence de ce mode est un plus non négligeable qui sera bien appréciée des joueurs souhaitant mettre au défi leur créativité ou s'aérer un peu l'esprit entre deux chapitres. On regrettera tout de même l’absence de multijoueur qui aurait beaucoup apporté à ce mode ; espérons que les développeurs y penseront la prochaine fois, si prochaine fois il y a.

Ça sent le dragon

Techniquement, le jeu n’est pas impressionnant, surtout pour de la PS4, mais il se rattrape par une direction artistique très réussie et une homogénéité dans ses décors qui, malgré l’aspect cubique, offre de jolis panoramas bien loin de l’aspect abrupt que l’on retrouve souvent dans les titres du genre. Visuellement, on ressent pleinement l’affiliation à Dragon Quest et même si le design d’Akira Toriyama se fait moins remarquer que sur les jeux canons de la série, tout le reste transpire la licence de Square Enix, entre les formes arrondies, le choix des couleurs, le retour des monstres emblématiques, etc... Il est certain qu’il ne plaira pas à tous, mais on ne peut que saluer le travail des artistes, qui ont su insuffler l’identité Dragon Quest à un style graphique très particulier inhérent au genre.

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On ressent les limitations techniques dues à la version Vita.

Musicalement, on retrouve le très respecté Koichi Sugiyama, compositeur attitré de la série depuis 30 ans, derrière les quelques thèmes du jeu. Si ceux-ci sont superbes, comme à l’accoutumée, ils sont malheureusement trop peu nombreux : écouter encore et toujours le même morceau qui tourne en boucle peut vite devenir lassant. C’est dommage, car la qualité est toujours présente. Croisons les doigts pour que le prochain épisode apporte plus de diversité musicale.

Peut mieux faire

Dragon Quest Builders est un bon jeu, aucun doute là-dessus. Cependant, il reste bien des domaines où il peut s’améliorer et nous sommes davantage face à un premier essai timide qu’à un jeu vraiment audacieux et complet. Entre l’absence du multijoueur, les quêtes trop classiques et limitées, le système de combat simpliste ou encore le nombre de compositions musicales restreint, on ne peut que regretter que Square Enix ne soit pas allé jusqu’au bout de ce concept qui a beaucoup à offrir. Espérons que les ventes seront suffisantes pour que le studio japonais réitère l’expérience et améliore les différentes mécaniques afin d’obtenir le jeu que l’on aurait peut-être souhaité avoir entre les mains en ce mois d’octobre 2016.

Original sans pour autant apporter de nouveautés, Dragon Quest Builders plaira certainement aux enfants attirés par l’univers Minecraft grâce à une accessibilité bien plus adaptée et à un design plus coloré, moins austère. De même, il saura certainement satisfaire les joueurs qui ont besoin de suivre une trame scénaristique - quand bien même celle-ci serait minimaliste -, d’être guidés pour apprécier un jeu. Quant aux fans de Dragon Quest et de vieux jeux d’aventure comme Zelda, foncez si vous êtes curieux, vous devriez passer un bon moment à explorer les différentes régions d’Alefgard, dont le nom pourrait très bien donner un petit coup de vieux à certains d’entre vous. Les plus déçus seront peut-être les joueurs de Minecraft, qui risquent de rester sur leur faim face à une liberté créative plus limitée, mais le jeu leur est-il vraiment destiné ?

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 Test réalisé par Lianai à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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Plateformes PlayStation 4, PlayStation Vita
Genres Action-RPG, fantasy, médiéval

Sortie 28 janvier 2016 (Japon)
Octobre 2016 (France)

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